«  Je vous exhorte, frères, par la tendresse de Dieu, à lui présenter votre corps – votre personne tout entière –, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu : c’est là, pour vous, la juste manière de lui rendre un culte. Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait... » (Rm 12, 1-3)

Ce qui dit saint Paul, la Vierge Marie l’a vécu. En effet,  l’attitude profonde de toute sa personne a bien été cet élan vers Dieu, ce désir profond de Lui plaire en tout. Alors, avec deux mots comme guide, prenons le chemin tracé par Marie.

Vertu, premier mot.  « La vertu est une disposition habituelle et ferme à faire le bien. Elle permet à la personne, non seulement d’accomplir des actes bons, mais de donner le meilleur d’elle-même. De toutes ses forces sensibles et spirituelles la personne vertueuse tend vers le bien ; elle le poursuit et le choisit en des actions concrètes » (CEC). « Le but d’une vie vertueuse consiste à devenir semblable à Dieu » dit saint Grégoire de Nysse dans son commentaire sur les Béatitudes : c’est donc l’itinéraire pour devenir soi-même, pour devenir ou redevenir ce que nous sommes des images de Dieu car « Dieu dit: « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance (…) Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme » (Gn 1, 26-27).

Les vertus sont en nous  pour nous aider à atteindre un but, en l’occurrence, plaire à Dieu, comme la Vierge. Contrairement aux idées reçues, les vertus n’ont rien de moralisant.  Rien d’ennuyeux, dans les vertus. Elles ne sont pas d’un autre âge. Elles sont de toujours. Elles sont des forces heureuses déposées en nous par notre Créateur. À nous de les déployer. Nous avons tous en nous une soif d’authenticité. Un désir d’incorporer  l’Évangile dans la réalité de nos vies c’est-à-dire que la Parole de Dieu transforme vraiment notre être intérieur. Tant de personnes rêvent de révolutions pour changer le monde mais la seule révolution qui vaille la peine d’être vécue est celle de notre cœur : c’est bien celle-là qui intéresse le Seigneur ! Et c’est bien celle-là que la Vierge peut nous aider à faire. Et c’est bien la seule aussi qui changera l’humanité. Un journaliste demandait à Mère Teresa : « que faut-il changer dans l’Église pour que ça aille mieux ? » « Vous et moi ! » a répondu la sainte fondatrice des missionnaires de la Charité !

Les vertus comme une force, comme un dynamisme pour aller dans le sens du meilleur, dans le sens de ce qui plaît le plus à Dieu.  La vie de la Vierge a été agréable à Dieu, à Jésus. Essayer de mettre en œuvre dans  nos vies ses vertus, plus exactement, de vivre les vertus à sa manière à elle, ne peut qu’être agréable à Dieu. Car la Vierge peut réellement dire ce que le Christ dit en l’évangile : « je fais toujours ce qui lui plaît », ce qui plaît au Père.

Plaisir, deuxième mot. Je fais toujours ce qui plaît à mon Père, dit Jésus en Jean 8, 29. Voilà le fondement de la vie du Christ, le fondement de toutes ses ini­tiatives. Sa « nourriture, c’est de faire la volonté de [son] Père » (Jn 4, 34 ; 14, 10), le plaisir de son Père.  Un saint Paul s’appliquait à discerner ce qui plaît au Seigneur, à marcher d’une manière digne de lui en vue de lui plaire en tout… « Nous avons à cœur de lui plaire, cherchant à lui plaire, à lui et non aux hommes » (1 Th 2, 4). C’était là l’objet de sa prédication. Son enseignement portait sur la manière de vivre qui plaît à Dieu. « Vous avez appris de nous, écrit-il aux chrétiens de Thessalonique, comment vous devez vous conduire pour plaire à Dieu » (1 Th 4, 1). Et la manière de vivre qui plaît à Dieu est celle du bien à penser, dire et faire.

Le plaisir, dans la perspective de plaire à Dieu, est donc le bien que l’on met en pratique. Le bien, c’est le plaisir qui à la fois réjouit le cœur de l’homme et le cœur de Dieu.  Comme Paul, et avec lui, avoir l’audace de penser que notre vie, et celle de toute personne peut causer à Dieu une véritable joie, un véritable plaisir, par le fait que notre vie sera orientée vers le bien. C’est d’ailleurs par là aussi que l’on peut goûter de plus grandes joies. S’oublier soi-même en cherchant le bonheur de son prochain devient la source d’une joie douce, toute intérieure, la source d’une grande paix. Le bien rend heureux. Faire le bien, vivre dans le bien rend heureux en soi-même. En cela, il est un plaisir qui plaît à Dieu. Puissions-nous, comme saint Paul avoir « à cœur de lui plaire » (2 Co 5, 9).

Faire le bien, vivre dans le bien, toute personne de bonne volonté le désire. Mais, son désir se heurte à des résistances extérieures – le mal fait son œuvre dans le monde – et intérieures – notre cœur est partagé. « Malheureux homme que je suis », s’écrie saint Paul dans sa Lettre aux Romains ! Car le bien qu’il veut faire, il ne le fait pas, et le mal qu’il ne veut pas, il le fait. Qui le délivrera de ce  dilemme ? Il donne lui-même la réponse : « l’Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus » nous a libérés « de la loi du péché et de la mort » (Rm 8, 2), au jour de notre baptême.

À l’ombre de l’Esprit, la Vierge a été prise, à l’ombre de l’Esprit Elle s’est tenue. La regarder, La suivre à travers les pages de l’Évangile ne peut que nous aider à avancer sur le chemin du meilleur à donner.

« Que votre amour soit sans hypocrisie. Fuyez le mal avec horreur, attachez-vous au bien. Soyez unis les uns aux autres par l’affection fraternelle, rivalisez de respect les uns pour les autres. Ne ralentissez pas votre élan, restez dans la ferveur de l’Esprit, servez le Seigneur, ayez la joie de l’espérance, tenez bon dans l’épreuve, soyez assidus à la prière. Partagez avec les fidèles qui sont dans le besoin, pratiquez l’hospitalité avec empressement. Bénissez ceux qui vous persécutent ; souhaitez-leur du bien, et non pas du mal. Soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent. Soyez bien d’accord les uns avec les autres ; n’ayez pas le goût des grandeurs, mais laissez-vous attirer par ce qui est humble. » (Rm 12, 10-16)

Plusieurs expressions contenues dans ce texte de saint Paul peuvent être mises en rapport avec  l’épisode évangélique de la Visitation qui est la rencontre de Marie avec sa cousine Élisabeth : « affection fraternelle », « respect », « ne ralentissez pas votre élan », « ferveur de l’esprit », « la joie de l’espérance », « pratiquez l’hospitalité », « soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie », « laissez-vous attirer par ce qui est humble ».

En effet, l’affection que la Vierge porte à sa cousine Élisabeth l’a mise en mouvement. Avec élan, elle est allée vers sa cousine. La rencontre des deux femmes est pleine de respect, elle s’accomplit dans la ferveur de l’esprit, dans la joie de l’espérance des enfants attendus. Dans l’élan d’une foi profonde. Justement, faisons un arrêt sur la foi.

Marie en sa Visitation, tel est le second pas sur le chemin que nous nous sommes proposé de suivre cette année.  Ce second pas est celui de la foi qui est une béatitude : « bienheureuse toi qui as cru » dit à Marie à Élisabeth, sa cousine.  Ce second pas est celui de la foi qui est mouvement, élan, marche en avant, un élan à ne pas ralentir, selon le conseil de saint Paul.

Ma­rie a écouté l’ange ; elle a cru que se réalisait en elle ce que l’ange lui a annoncé : devenir  la mère du Sauveur. Mais l’ange lui a fait une autre annonce et Marie a eu comme besoin non pas de vérifier si c’était vrai, mais de rencontrer chez sa cou­sine Élisabeth l’œuvre que Dieu accomplissait. C’est donc une démarche essentiellement de foi à l’intérieur de ce double mystère, de la double annonciation de la conception de Jésus en Marie et de la conception de Jean en Élisabeth.

La Vierge Marie est donc partie en hâte, avec élan car, comme le dit saint Bernard  dans son commentaire de la Visitation, « la grâce du saint Esprit ne connaît pas les hésitations et les retards ».  Marie s’est donc mise en mouvement  par la seule grâce de l’Esprit saint en elle, et elle est en même temps attirée par la grâce du même Esprit saint qui fait que dans sa stérilité Élisabeth va avoir le bonheur d’être elle aussi mère.

Il s’agit donc, comme saint Paul le dira plus tard, d’une démarche « qui va de la foi à la foi »  (Rm 1, 17),  ou plus exactement de la foi vers la reconnaissance du fruit de la foi – ce fruit étant l’enfant. L’élan de sa foi a conduit la Vierge vers sa cousine. Et sa cousine, sans avoir reçu aucune ex­plication rationnelle, comprend qu’elle reçoit « la mère de son Sauveur. » Elle est introduite mysté­rieusement dans le mystère. Mais c’est peut-être le tressaillement de son enfant qui le lui a fait entrevoir. Car lorsque Marie portant en elle le Sauveur arrive en sa maison, Élisabeth sent tressaillir en elle l’enfant qu’elle porte. Et ce tressaillement d’allégresse de l’enfant va faire  jaillir de la bouche d’Élisabeth, cette profession de foi : « Bienheureuse, toi qui as cru ! ». Marie a cru non seulement à la parole de l’ange pour elle-même, mais aussi, à la parole de l’ange pour Élisabeth. C’était pour cela que Marie est venue visiter sa cou­sine, pour se réjouir avec elle de ce que Dieu fait en chaque personne. Il y a là une double leçon :

La pre­mière : il est heureux de croire. Alors, pour raviver en nous l’élan de la foi, plus exactement, pour raviver en nous la foi afin qu’elle donne à nos existences leur élan, jetons le regard de notre esprit vers la Vierge. Comme le dit saint Ambroise :« que l’âme de Marie soit en chacun de vous pour qu’elle exalte le Seigneur ! Que l’esprit de Marie soit en chacun de vous pour qu’il exulte en Dieu. » Cela ne peut se réaliser en nous, doucement, petit à petit, au fil de nos jours de vie,  que par un regard prolongé posé sur la Vierge, que par le murmure incessant de son Nom.

La seconde, très importante : même Marie a eu besoin, pour conforter sa propre foi, de se mettre à l’écoute de ce que Dieu fait chez quelqu’un d’autre, de ce que Dieu a fait  en sa cousine Élisabeth. En effet, si la foi reste vraiment personnelle, le bonheur de croire est communautaire. Et ce bonheur de croire est le fruit de la découverte que nous pouvons faire de l’œuvre de Dieu dans la vie des autres. L’élan de la foi nous lance en avant de nous-mêmes. Le regard prolongé sur la Vierge permet de poser sur les autres un regard tout autre.

La hâte, l’empressement, c’est le mouvement de la foi. La foi nous fait sortir de nous-mêmes et aller de l’avant. Cette hâte, cet empressement, c’est la grâce du Saint Esprit en nous, du Saint Esprit qui fait toutes choses nouvelles. Des chemins nouveaux peuvent alors s’ouvrir en nos vies, ou se laisser redécouvrir comme ceux de l’amitié, de la fraternité, du respect de l’autre, de l’hospitalité, pour reprendre les conseils donnés par saint Paul.

« Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons. Oui, la vie s’est manifestée…. Tel est le message que nous avons entendu de Jésus Christ et que nous vous annonçons : Dieu est lumière ; en lui, il n’y a pas de ténèbres. Si nous disons que nous sommes en communion avec lui, alors que nous marchons dans les ténèbres, nous sommes des menteurs, nous ne faisons pas la vérité  Mais si nous marchons dans la lumière, comme il est lui-même dans la lumière, nous sommes en communion les uns avec les autres….. » (1Jn 1, 1-7).

La vie véritable serait-elle lumière ? Saint Jean semble bien nous dire que c’est ainsi. Il commence en effet à nous parler de la Vie qui s’est manifestée puis ensuite il enchaine sur la Lumière qu’est Dieu, qu’est le Christ Lui-même.  Entre la vie et la lumière, il y a donc un rapport, un lien.

Quand Dieu crée, il commence par créer la lumière, puis tout ce qui vit. Avant la lumière, quand elle n’existe pas encore, la terre est vide, sans vie. La vie n’apparait qu’après la lumière : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. Or la terre était vide et vague, les ténèbres couvraient l’abîme, un vent de Dieu tournoyait sur les eaux. Dieu dit : « Que la lumière soit » et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne…. » (Gn 1,1-4).

La lumière nécessaire à la vie ?  Le grand chimiste Antoine Lavoisier (1743-1794) le dit quelque part : « L’organisation, le mouvement spontané, la vie n’existent qu’à la surface de la terre, dans les lieux exposés à la lumière… Sans la lumière, la nature était sans vie : elle était morte et inanimée. »

Le psalmiste l’avait compris : Dieu est Vie – « Lorsque je traverse un ravin de ténèbres et l’ombre de la mort…, je ne crains rien car Il est avec moi… » ; Dieu est Lumière – « La ténèbre pour Toi n’est pas ténèbre !  La nuit comme le jour est Lumière…. »

Il y a donc un lien entre la vie et la lumière.  Lorsqu’on réfléchit sur la personne du Christ, ces deux notions de vie et de lumière s’imposent. C’est saint Jean qui nous le fait comprendre. Car Jésus est pour saint Jean Vie et Lumière.

Le Christ, Verbe, Parole, une Parole qui fait ce qu’elle dit. Entre son expression et sa réalisation, pas de distance. Parole qui est donc vraie, véritable, qui est donc vie, la vie véritable, la vraie. Le Christ est aussi Lumière car il nous dévoile ce qu’est la vraie vie. Il nous en donne la connaissance. Et cette connaissance est à la fois intelligence, dans le sens de compréhension, et sagesse, en ce sens que l’on peut en faire l’expérience.

« Dieu est Lumière, en Lui point de ténèbres » s’exclame saint Jean en sa première lettre. « Je suis la Lumière du Monde » (Jn 8, 12)  affirme le Christ, dans l’évangile de ce même saint Jean. Le vieillard Syméon dit de l’Enfant Divin qu’Il est La «  lumière pour éclairer les nations… » (Lc 2, 32) Jésus-Christ est La Lumière du monde, Lui qui est « le centre du cosmos et de l’histoire » selon les mots de Saint Jean-Paul II dans son  encyclique Le Rédempteur de l’homme.

Laissons-nous attirer par cette Lumière qu’est le Christ Jésus. Il est La Lumière qui seule peut nous rendre à notre beauté première – cette beauté première qui fait de nous des vivants.  Car Jésus est La Lumière qui chasse nos ténèbres intérieures – ténèbres du péché, ténèbres de la peur, qui fait reculer toutes nos obscurités cachées aux yeux du monde et même parfois à nos propres yeux  mais que Lui seul  connaît.

Jésus est La Lumière bienfaisante de notre cœur, de notre intelligence, de notre mémoire. Jésus est cette Lumière qui nous donne de voir selon Lui toute chose, toute personne, tout  événement, cette Lumière qui nous fait être debout dans la vie si, bien sûr, nous nous mettons sous son influence. Alors, cette Lumière  éclaire nos pensées, notre conscience, elle inspire nos paroles, nos décisions, elle conduit et oriente nos actions.

Jésus est La Lumière que l’on peut accueillir en soi, et laisser nous traverser pour qu’Elle atteigne les quatre coins du monde, comme si j’étais un simple et modeste fil électrique, selon une image que l’on trouve chez Mère Teresa de Calcutta. Voilà ce qu’elle écrit en effet:

« Chacun de nous reste seulement un petit instrument. Si tu observes les composants d’un appareil électrique, tu y verras un enchevêtrement de fils grands et petits, neufs et vieux, chers et pas chers. Si le courant ne passe pas à travers eux, il ne peut pas y avoir de lumière. Ces fils, ce sont toi et moi. Le courant, c’est Dieu. Nous avons le pouvoir de laisser passer le courant à travers nous, de le laisser nous utiliser, de le laisser produire la lumière du monde (Mt 5, 14) — ou de refuser d’être utilisés et de laisser les ténèbres s’étendre ».

Il y en a une qui a laissé passer la Lumière…. Non seulement elle l’a laissé passer, mais elle l’a révélée et n’en diminue aucunement l’éclat parce qu’elle est totale transparence.

Comme l’étoile laisse passer la lumière du soleil, ainsi la Vierge laisse passer la Lumière divine. Elle nous guide vers cette Lumière. La regarder, murmurer son Nom, cela apaise, éclaire le cœur et la conscience, ravive le désir du meilleur à donner. Tout prend sens. En effet, la Vierge attire vers ce qui est beau et bon, vers ce qui est vrai, elle en donne le goût, l’intuition. Et ceci oriente nos existences dans une certaine direction qui est celle de l’harmonie, de la communion, du vrai amour. Celles-ci atteignent alors leur signification profonde qui est de vivre de la vie véritable, celle de l’Évangile.

Et le nom de la jeune fille était Marie : «  L’ange entra chez elle et dit : « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. »  À cette parole, elle fut toute bouleversée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation.  L’ange lui dit alors : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu.  Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus.  Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ;  il régnera pour toujours sur la maison de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. »  Marie dit à l’ange : « Comment cela va-t-il se faire puisque je ne connais pas d’homme ? »  L’ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu. […]  Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » Alors l’ange la quitta » (Lc 1, 26-28

«Que tout m’advienne selon ta parole». Écouter pour connaître ce qu’il faut faire et donner sa réponse. L’attitude de Marie n’est ni brusque, ni agitée. Son attitude est plutôt ordonnée, conduisant réellement à une rencontre. Marie accueille. Marie écoute, interrogative, attentive, éveillée. Elle est entièrement engagée, disponible. Mais à quoi ? À l’impossible.  Elle est prête. Elle a reçu un appel. Elle comprend que quelque chose de grand va se passer. Quelque chose va advenir, quelque chose qui sera nouveau. Ce quelque chose qui arrive de la part de Dieu fait irruption en sa vie. Ce n’était pas prévisible. Mais elle dit sont « Oui ». L’Esprit Saint bouscule souvent toutes prévisions.

«Que tout m’advienne selon ta parole». On a parfois peur de prononcer ces quelques mots. Jusqu’où vont-t-ils me conduire si d’aventure Dieu me prenait au mot ? Pourquoi cette peur ?

Cela vaut la peine de s’interroger sur cette méfiance à l’égard de Dieu : ne veut-il pas notre bonheur ? Ne sait-il pas de quoi nous sommes faits, lui qui est notre Créateur ? Ne connaît-il pas toutes nos pauvretés, toutes nos faiblesses, nos goûts, nos talents. Il nous connaît chacun bien mieux que nous-mêmes ! Lui qui nous aime jusqu’à l’extrême, et qui est toute bonté ! Comment peut-on le soupçonner de nous tendre une sorte de piège pour nous rendre malheureux Lui qui a tout créé bon ? « Et Dieu vit que cela était bon » (Gn 1).

Ce soupçon ne nous rappelle-t-il pas le chapitre qui suit, à savoir, le récit de la création où le serpent, symbole du mal et du mensonge chuchote à Ève : “Alors, Dieu a dit : Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ?”La femme répondit au serpent : “Nous pouvons manger du fruit des arbres du jardin. Mais du fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, sous peine de mort.” Le serpent répliqua à la femme : “Pas du tout ! Vous ne mourrez pas ! Mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des dieux, qui connaissent le bien et le mal.”

Le doute s’infiltre dans le cœur d’Ève : elle croit que Dieu est contre elle, contre l’homme, contre leur véritable épanouissement ! La confiance de l’être humain envers Dieu est alors altérée et la brisure devient déchirure dans laquelle s’engouffre la peur ….  Adam et Ève ne sont plus disponibles pour  accueillir le projet de Dieu en leur vie.

La Vierge Marie nous montre le chemin inverse. Ce chemin inverse est celui de la confiance : Le Seigneur est venu en sa vie. Il s’est penché vers elle. Il lui a annoncé la venue en elle du Verbe, de la Parole éternelle, Jésus-Christ, et cela par l’action de l’Esprit Saint. Il a attendu son « oui » libre … Elle a posé une question  pour comprendre ce qu’elle devait faire, pour être ajustée au Dessein divin…. Et puis elle a dit «Je suis la Servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon Ta parole ». Et le Verbe s’est fait chair, et il a demeuré parmi nous…. par le « oui » libre de cette femme !

Toute personne, nous dit saint Jean-Paul II, se réalise pleinement dans le don désintéressé d’elle-même ! Alors ne craignons pas de dire « que tout m’advienne selon ta parole »…. Être à l’écoute de cette Parole, à l’écoute de qu’il nous enseigne par sa Parole, en et par son Église, lui faire confiance, être disponible pour le suivre, jour après jour, pas à pas, au jour le jour, le suivre au cœur des petites choses,  au quotidien,  c’est là qu’il nous faut le suivre. Certes, on n’a peut-être pas grand-chose à lui donner, à lui offrir, mais on peut toujours lui offrir notre désir de le suivre !

Jour près jour, il me façonne  « Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais ! Tu sais quand je m’assois, quand je me lève ; de très loin, tu pénètres mes pensées. Que je marche ou me repose, tu le vois, tous mes chemins te sont familiers. »  Car « c’est toi qui as créé mes reins, qui m’as tissé dans le sein de ma mère.  Je reconnais devant toi le prodige, l’être étonnant que je suis : étonnantes sont tes œuvres toute mon âme le sait. » (Ps 138)  Lui offrir tous nos hivers et touts nos étés. Son feu est là, sous nos cendres,  prêt à repartir.

Désirer qu’il mette de l’ordre en moi-même où s’éprouvent peut-être tant de sentiments contraires, que je voie plus clair afin de faire  ce qui lui plaît car ce qui lui plaît c’est que je vive de sa vie. Alors, lui demander d’éclairer mes pensées, d’inspirer mes paroles et de guider mes actions. Désirer une vie qui Lui plaise, dans une persévérance faite d’une folle confiance.

FIN

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