« Quand nous louons Dieu, notre intelligence, notre cÅ“ur, notre esprit et notre volonté doivent prendre part à ces louanges. Nous devons penser à ce que nous faisons [….] Une condition nécessaire pour louer Dieu est la joie de l’esprit, à l’exemple de la Sainte Vierge Marie qui s’écria : «Mon esprit exulte en mon Dieu » (Bx P. Gabriel-Maria)

« Tu es seul Saint, Seigneur Dieu…Tu es Joie » écrit saint François dans les louanges qu’il composa pour frère Léon : Dieu est Joie. Jésus est rempli de Joie : « A cette heure même, [Jésus] tressaillit de joie sous l’action de l’Esprit Saint et il dit : ‘ Je te bénis, Père, seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits…’ » (Luc 10, 21)

« Mon esprit tressaille de joie en Dieu mon Sauveur » (Luc 1 47) chante Marie dans son Magnificat. Souffle de joie qui parcourt la Bible d’un bout à l’autre, souffle de joie qui s’amplifie sans limite au fil de l’Évangile et dans toutes les lignes du Nouveau Testament. « Le fruit de l’Esprit est Joie » (Ga 5, 22). Oui ! Cette joie-là, celle que Gabriel Maria appelle de ses vœux dans notre louange est la joie de l’Esprit Saint.

Nous pensons que cette joie ne dépend pas de notre bon vouloir. Nous la confondons trop souvent avec la gaîté, la bonne humeur, les grands éclats de rires. Alors quand la vie est dure, quand je suis dans l’épreuve comment ne pas être envahi par une sorte de chagrin dans ma prière ? En songeant à tant de souffrances de par le monde, tant de conflits qui déchirent la famille humaine, comment louer le Seigneur avec le cœur en fête ?

Justement ! Si le mal est contagieux, la joie l’est bien davantage. Il ne s’agit pas, encore une fois, de la gaîté et des grands éclats de rire. Il s’agit de cette joie profonde qui est le signe de la présence de Dieu. Pour être plus exacte, cette joie demeure en nous puisque Dieu demeure en nous, puisque nous sommes habités par Dieu Trois fois saint et que Dieu est joie. Il s’agit donc de nous ouvrir à cette joie en personne qui brille à la fine pointe de notre âme. Cette joie que nul ne peut ravir, cette joie que nul ne peut éteindre. Cette joie qui scintille et chasse les ténèbres comme un phare la nuit ou en pleine tempête. Une joie qui est la joie du Ciel en nous. Une joie qui est douceur et paix car Dieu est toute notre douceur et toute notre paix. Une joie qui réconforte ceux qui sont dans la détresse, qui fait reculer la nuit, qui ranime l’espérance. « Ne vous affligez pas : la joie du Seigneur est notre rempart » (Ne 8, 10)

Le père Gabriel-Maria nous invite à servir le Seigneur avec un cÅ“ur plein d’amour : Dieu est Amour, Dieu est joie. Et, ne l’oublions pas : l’Esprit Saint prie en nous. Le Don perpétuel du Père à son fils et l’élan perpétuel du Fils vers le Père est en nous comme il est en Jésus-Christ, le Fils en qui nous prions le Père. Esprit Saint qui « se joint à notre cÅ“ur pour qu’à notre tour nous disions Abba ! » (Rm 8, 15). Le croire, même dans la nuit. Et puis…, pensons aussi à cela : il y a un lieu « approprié aux louanges divines » et c’est l’église « car elle est consacrée pour le service divin, et en elle repose le Corps véritable de Notre Seigneur ». (Bx P. Gabriel-Maria)

Quoi de plus beau que d’entrer dans une église en laquelle rayonne la mystérieuse présence réelle du Christ dans son oblation. On a l’habitude d’enfermer les trésors dans des coffres forts et de les mettre en lieu sûr. Mais ce Trésor des Trésors qu’est Jésus Hostie, cette humble mode de présence qu’il a choisi pour rester avec nous tous les jours jusqu’à la fin des temps, se met à notre portée dans le dépouillement le plus total. Il s’expose à notre adoration comme à toutes nos indifférences, tous nos mépris, tous nos blasphèmes. Il est là pour nous. Comme le dit le prologue de l’évangile selon saint Jean, « le verbe s’est fait chair, et il a campé parmi nous » (Jn 1, 14) Il campait jadis avec le peuple hébreu dans le désert, Il a campé parmi nous à l’instant où il s’incarna dans le sein de la Vierge Marie et il campe encore et pour toujours avec nous dans tous les tabernacles du monde (tabernacle signifie ‘petite tente’).

Le Père Gabriel-Maria nous ancre dans le réalisme de l’Incarnation qui se prolonge dans le mystère de l’Eucharistie, de ce Pain vivant qui est Jésus-Christ offert pour notre salut aujourd’hui et maintenant. Et du coup nous sommes invités à répondre à cette offrande silencieuse et bien réelle par des actes concrets et tout aussi réels et incarnés : honorer d’un cœur profondément aimant et fidèle la présence du Seigneur dans l’église de ce monastère pour moi et pour mes sœurs, dans votre église paroissiale pour chacun et chacune de celles et ceux qui liront cette lettre, dans toutes les églises devant lesquels vous passez lors de vos déplacements. Mais aussi prendre soin de nos églises et de la liturgie de mille façons. En tout cela, Gabriel Maria, en bon frère mineur, est tout simplement un digne disciple de Saint François d’Assise : ce dernier qui commença par restaurer l’église de Saint Damien, avait très à cœur de respecter tout ce qui touche et entoure le Corps et le Sang de notre Seigneur Jésus-Christ. Je vous invite à lire sa « lettre à tous les clercs », et aussi la première admonition de saint François d’Assise qui concerne aussi le Corps et le Sang très saints du Seigneur. Et tant d’autres passages dans ses écrits. Et encore ces mots si célèbres du Poverello, tirés de son testament : « Nous t’adorons, seigneur Jésus-Christ, dans toutes les églises du monde entier, et nous te bénissons d’avoir racheté le monde par ta Sainte Croix » (Saint François d’Assise).

« Parle car ton serviteur écoute »  dit le jeune prophète Samuel en réponse à l’appel du Seigneur. (1 S 3, 10).

Si  vous passez un jour au monastère de Thiais, vous pourrez admirer dans l’église les vitraux représentant les dix vertus de la Vierge Marie. Vous contemplerez la libre illustration de cet itinéraire que nous découvrons et creusons ensemble depuis déjà quelque temps.

Le sixième vitrail illustrant notre nouvelle étape choisit d’exprimer la vertu d’obéissance par  les  dix premiers chiffres romains. Dix pour dire les dix commandements. Dans le langage biblique, il s’agit plus exactement des dix Paroles.

Cette illustration dit exactement l’obéissance de Marie qui est l’obéissance du Christ et celle que le disciple authentique de Dieu est appelé à vivre : l’obéissance dans la Bible  est écoute. C’est le grand « Écoute Israël ! » jaillissant du cÅ“ur de Dieu (Dt 5, 1). « Parle car ton serviteur écoute »  dit le jeune prophète Samuel en réponse à l’appel du Seigneur. (1 S 3, 10). « [Le Seigneur] éveille chaque matin, il éveille mon oreille pour que j’écoute comme un disciple. Le Seigneur m’a ouvert l’oreille, et moi je n’ai pas résisté, je ne me suis pas dérobé… » (Is 50, 4-5).

Écouter et mettre en pratique. Écouter et laisser cette Parole divine transformer le cœur et tout l’être pour façonner un disciple ajusté au pas du Seigneur.

« Je suis la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta Parole » (Lc 1, 38) : Marie est bien là dans cette dynamique du disciple finement attentif au pas de Dieu dans le jardin. Elle écoute, elle accueille, elle médite et garde dans son cœur, elle confronte la Parole au réel de sa vie et elle la laisse prendre chair en elle. Marie, ajustée au murmure subtil de l’Esprit Saint pas après pas, jour après jour, tout au long de son pèlerinage de foi en cette vie, dans une profonde liberté.

Rien ni personne  n’oblige Marie.  Elle choisit d’écouter profondément. Elle choisit de répondre. Elle choisit chaque jour d’être accordée à cette Parole. C’est cela profondément l’obéissance de Marie.

Le bienheureux père Gabriel-Maria,  dans les lignes qui suivront et que nous découvrirons dans les numéros suivants du Message marial, exposera comment nous allons imiter cette obéissance de Marie.  Cependant je voudrais déjà vous livrer quelques pistes de réflexion sur ce sujet :

Dans l’histoire du monachisme, l’exigence de l’obéissance advint très progressivement avec le développement du cénobitisme c’est-à-dire de la vie en communauté (le monachisme à l’origine est né avec les Pères du désert qui vivaient en ermites et si nous voulons remonter encore plus loin dans l’histoire de la vie consacrée, les Vierges consacrées furent les « premières nées » dans cette forme de vie toute vouée à Dieu ).

Si l’obéissance monastique est liée ainsi à la vie commune, cela nous donne une première clé pour bien comprendre qu’elle est recherche du bien commun ; le bien commun étant la réalisation du bien particulier de chacun et non celui de quelques-uns au détriment des autres.

Nous n’y pensons guère mais dans la vie courante tous nous obéissons. Si nous voulons avoir notre train ou notre avion, il nous faut obéir aux horaires proposés par la SNCF ou par la compagnie aérienne. Si  nous n’obéissons pas au code de la route, par exemple au feu qui passe au rouge, nous recevons une amende, nous perdons quelques points sur notre permis de conduire et dans le pire des cas nous provoquons un accident. Les jours d’élections, si je me présente à 20h10 au bureau de vote, je ne peux pas exercer mon devoir de citoyenne ou de citoyen. Si vous voulez forcer un poussin à sortir plus vite de son Å“uf sans obéir à  son rythme et au rythme de l’éclosion,  le poussin va mourir. Nous pourrions multiplier à l’infini les exemples : nous obéissons beaucoup et ceci pour le bien de chacun et de tous. Et l’oubli, l’indifférence, l’individualisme  ou la négligence dans ces domaines peuvent aboutir à des drames.

Un souvenir me revient : quelques années avant mon entrée à l’Annonciade, il y a donc plus de vingt ans, une émission télévisée présentait des écoles désignées comme « particulières ». Entre autres étaient présents sur le plateau et dans les reportages, des élèves d’une école de danse et un champion  du monde de patinage artistique. Le journaliste interrogeait ce patineur sur les grandes exigences de ces écoles à l’égard de leurs élèves. Le patineur répondit que ces exigences étaient libératrices. – « De quoi vous libèrent-elles ? » s’étonnait le journaliste.- « De moi-même ! » s’exclama le patineur.  L’obéissance entraînerait-elle vers le meilleur insoupçonné de soi ?

Saint Paul nous ouvre une autre porte pour aller plus loin dans la compréhension de la vertu d’obéissance : « Soyez soumis les uns aux autres » (Ep 5, 21) – « Ayez entre  vous les mêmes sentiments qui sont dans la Christ Jésus : Lui, de condition Divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu… Agissez en tout sans murmures ni contestations … » (Ph 2, 5-6. 14)

Il  ne s’agit pas de se soumettre à une autorité tyrannique mais de se soumettre les uns aux autres. Soyons lucides : le penchant naturel de l’humain est plutôt de chercher à dominer l’autre et à être le maître de l’autre. Là est une source essentielle de conflits, de souffrances dans les relations humaines, de troubles. L’invitation à se soumettre les uns aux autres est en revanche un chemin de paix. Non  pas la paix des cimetières, fruit de la destruction des uns par les autres, de l’étouffement des uns par les autres. Mais fruit de l’écoute réciproque et de l’accord profond qui en découle.

J’en ai assez dit pour aujourd’hui ! N’allons pas plus loin mais réfléchissons à cette obéissance qui est écoute. Regardons Marie dans son « Fiat ». Pensons à cette appel de Dieu adressé à chacune et chacun de nous : Écoute !

« Il nous faut posséder Marie pauvre et indigente. Point n’est besoin de chercher longtemps pour trouver la pauvreté de Marie. On la voit briller dans toute sa vie. Mais je vais vous expliquer en cinq points, comment nous devons être de pauvres «Marie. » (Bx P. Gabriel-Maria)

« La première condition, pour une pauvreté véritable, est la liberté. On la possède lorsqu’on renonce à toutes choses volontairement, en pleine liberté ; que, par amour pour Jésus, de tout cÅ“ur et librement, on renonce à ce qui est superflu ; qu’on se contente du nécessaire, voire que l’on n’en use qu’avec mesure. Â»

Si la pauvreté est liberté alors l’avoir  est  servitude. Mais, faut-il ne rien avoir ? Non bien sûr ! L’avoir est servitude lorsque j’y mets mon cÅ“ur. L’avoir me possède autant que je le possède. La pauvreté évangélique est un chemin de liberté parce qu’elle est un chemin de dépossession : « Là où est ton trésor là aussi sera ton cÅ“ur » dit Jésus. Je peux posséder des biens matériels. Je peux aussi posséder des biens spirituels. Je suis profondément captif d’une grande variété de possessions.  Gabriel Maria propose à renoncer au superflu pour se tourner vers la sobriété, en faisant un usage pauvre des biens.  On est tout à fait dans la sobriété heureuse dont parlait si souvent le Pape François.

«La seconde condition d’une vraie pauvreté est d’être joyeuse. Nous devons nous satisfaire à avoir plutôt moins que plus… Bref, nous devons nous réjouir en toute sorte de pauvreté…. »

Se réjouir de tout ! Quel programme ! A première vue c’est incompréhensible. Nous combattons bien sûr la misère et les injustices à travers le monde et nous avons raison. Mais il ne s’agit point ici de misère mais de ma pauvreté et ses multiples manifestations, des injustices qui atteignent mon amour propre ou mes sécurités. En fait, il s’agit de changer notre manière de vivre les événements qui nous atteignent. Si vous lisez la vie de sainte Thérèse de Lisieux « Histoire d’une âme » ou « Conseils et souvenirs » : pour ma part, je m’émerveille toujours de sa façon de tout tourner en positif. Elle ne se lamente jamais de ce qui lui arrive dans son humble quotidien. Non par naïveté ou par l’application de la méthode Coué. Mais simplement parce qu’elle est enracinée dans la foi, l’espérance et la charité ; elle a une totale confiance en Celui qui est toujours là.

« La troisième condition de la pauvreté consiste à partager généreusement avec le prochain… Â»

La pauvreté est offrande, offrande de nous-mêmes, de tout ce que nous avons. Tous nos biens nous sont donnés par Dieu pour construire une relation avec les autres. Tous les biens sont reçus et « tout ce qui n’est pas donné est perdu » disait Mère Teresa en reprenant un proverbe indien. Ces quelques mots nous invitent avec insistance à la générosité. Pour vivre  ce troisième conseil et cultiver la vertu de pauvreté, il faut peu à peu passer d’un besoin de sécurité tout humain à un abandon total et confiant en la Providence divine. En Dieu seul est l’authentique sécurité que lui seul peut nous donner.

« La quatrième condition de la pauvreté est le détachement. Nous devons éloigner notre esprit et notre cÅ“ur de tous les biens de la terre. […]. Nous devons ne pas y mettre nos affections, au point de ne pas nous en préoccuper. C’est alors que nous serons vraiment pauvres en esprit, selon la parole de l’Évangile : «Bienheureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux leur appartient. Â» (Mt 5, 3)

Le chemin tracé est rude dans le concret d’une vie. Il invite à un authentique abandon. Et cet abandon nous fait passer par l’expérience du manque. Vous l’avez remarqué ? Nous avançons d’une pauvreté extérieure à une pauvreté intérieure. La pauvreté spirituelle qui ouvre la porte du Royaume des Cieux dés maintenant, dans l’instant où je renonce à toute sécurité, à tout confort intérieur, spirituel pour attendre tout de Dieu seul. Je rejoins peu à peu ces « anawims Â» de la Bible, ces petits qui se sont remis totalement dans les mains de Dieu. Il me semble également que les précédentes conditions de la pauvreté nous laissaient une bonne part d’initiative. Il s’agissait de choisir. Mais dans le dépouillement, celui qui choisit l’abandon renonce même à l’initiative. Il choisit de se remettre en tout entre les mains de Dieu. Nous atteignons peu à peu un point où c’est Dieu seul qui agit et moi  j’accueille. Je choisis d’accueillir et de me laisser aimer, de me laisser faire.

« La cinquième condition de la pauvreté est l’union. Cela veut dire qu’il nous faut unir notre pauvreté à celle de Jésus et de Marie afin que, de leur côté, ils unissent à la nôtre les richesses de leur pauvreté. Ainsi, par cette belle «Dame Pauvreté », nous entrerons en possession des trésors de Jésus et de Marie et nous deviendrons particulièrement leurs amis Â»

L’union à Dieu : voici bien le but de notre vie, de notre pèlerinage ici-bas. S’unir à Dieu c’est plonger profond en Dieu dès maintenant. Plonger  dès  cet instant en la Très Sainte Trinité et nous y établir comme le disait sainte Élisabeth de la Trinité. M’unir à Dieu et même, bien plus justement, laisser Dieu nous unir intimement à Lui et qu’Il fasse en nous ce qu’Il lui plaît. C’est pour cela que j’existe.

Ma pauvreté est le meilleur des ponts pour m’unir à Jésus. C’est notre tremplin vers le Divin CÅ“ur. Parce que nous le disons souvent : Dieu est en bas de l’échelle. Nous le cherchons toujours tout en haut. Nous allons de découragement en découragement en essayant à force d’efforts et d’exercices spirituels divers de grimper jusqu’au plus élevé des échelons en espérant enfin nous unir à Dieu. Mais Dieu, lui descend tout en bas, dans notre vase visqueuse. C’est là qu’on le trouve : il vient me prendre dans ses bras  et me porter sur son cÅ“ur comme ses petits agneaux fragiles. C’est très beau et très simple d’écrire ces mots mais il faut le reconnaître : faire l’expérience de notre pauvreté très concrètement, ce n’est pas drôle.  Mais, «que rien ne te trouble que rien ne t’effraie : qui a Dieu ne manque de rien. Dieu seul suffit » écrit sainte Thérèse d’Avila. Oui. Comme tant d’amis de Dieu, au bout du chemin de dépouillement je trouve Dieu, je le rencontre, je me remets réellement à Lui dans un infini abandon. Et son trésor devient le mien. Cela vaut la peine d’aller jusqu’au bout en se laissant faire !
 

«La vertu de miséricorde plaît beaucoup à Marie vu qu’elle est Reine de grâce et de miséricorde. Charité, grâce, bonté de cœur, pitié, miséricorde ne sont qu’une seule et même vertu : elles sortent toutes d’une même racine, la vraie charité. Dans la pratique de cette vertu, nous devons surpasser tout le monde et avoir compassion du monde entier.» (Bx Père Gabriel-Maria)

Notre itinéraire entame l’étape du sommet, celle de charité et de miséricorde qui se confondent car toutes les vertus n’en font qu’une : l’Amour … Dieu est Amour.

La vraie Charité : un jour, en haut d’une armoire dans laquelle étaient rangés des livrets de méditation du Rosaire, on a trouvé un « chemin de Croix » écrit par une annonciade d’une génération passée. En le feuilletant, on pouvait y lire : « Tout votre Corps respire la charité ».

Elle commentait la 13ème station, « Jésus est descendu de La Croix ». Le corps du Christ détaché de la Croix, ce Corps labouré par les coups, les crachats, les insultes, les blasphèmes, les flagellations, la crucifixion. Ce corps inanimé, défiguré par la torture : voilà la charité ! me dit cette sœur d’antan que je n’ai jamais connue, dire que ce corps qui est un cadavre « respire la Charité » : Quel mystère. Il est l’expression du « ayant aimé les siens il les aima jusqu’au bout » du jeudi saint. Aimer d’un amour vrai, un amour qui donne vie, qui donne la Vraie Vie qu’Est Dieu. Il s’agit d’être amour de l’Amour de Dieu.
Avec les conseils du Père Gabriel Maria, nous nous engageons dans ce qui est tout le but de la vie : nous laisser unir, former, conformer à Jésus et par lui plongés dans la Sainte Trinité qui demeure en nous. Tout le sens de la Vie est là ! Ma vie n’a de sens que parce que Jésus a pris ma mort sur lui pour me donner Sa Vie divine. Devant un tel mystère je comprends que le Franciscain prenne le temps de nous guider à sa manière toujours très concrète pour vivre de ce mystère dans notre quotidien.

La vertu de miséricorde : justement il s’agit bien là de la vraie vie. L’Amour miséricordieux de Dieu donne vie. Il y a une charité qui étouffe, qui écrase, qui détruit : cela n’est pas du tout la Charité. Il y a une charité, la vraie, celle que Dieu est qui est essentiellement jaillissement de vie. Cet amour est l’être de Dieu.

Avoir compassion du monde entier : vaste programme qui nous entraîne vers toutes les périphéries comme nous y invitait si souvent le Pape François. Aimer toute la famille humaine, certes, mais par des actes concrets de charité à l’égard de ceux qui sont autour de nous et dont nous sommes appelés à nous faire proche. Alors allons-y.

Si on parle de mise en pratique d’une vertu, le père Gabriel Maria nous invite à ne pas en rester à des discours sur la charité vraie. La vertu est dynamique – du dynamisme de l’Esprit Saint et elle prend corps dans des actes concrets.

Quand le Seigneur m’inspire un acte ou une parole pleine de sa bonté, sans bruit de parole mais en inclinant mon cœur vers ce bien à accomplir alors ne nous bouchons pas les oreilles du cœur. Posons les actes qu’il nous inspire et plus nous sommes dociles à ces motions spirituelles plus notre amour se fortifiera, grandira, embrasera tout mon être pour courir sur ce chemin si simple de la bonté.

En revanche si je fais la sourde oreille, me freinant dans la mise en œuvre des actes de charité vraie que Dieu m’inspire, alors la douce voix s’amenuise et attend que je sois disponible et généreuse. Ainsi, le Seigneur cherche la bonne terre en moi qui donnera du fruit au centuple.

Entre nous, au milieu de la communauté dans laquelle Dieu m’a plantée : c’est là le terreau réel où je suis appelée à aimer et à me laisser aimer. C’est dans cette lourde glaise que le Seigneur va me façonner un cœur réellement aimant. C’est tellement plus facile d’aimer tout le monde que d’aimer celui ou celle qui est à côté de moi, dans ma communauté, dans ma famille, au bureau ou à l’atelier. C’est tellement plus facile de compatir à tant de personnes qui souffrent au loin de cataclysmes que de compatir à celui qui est à côté de moi, sous le même toit que moi, qui me casse les pieds mais qui justement à peut-être un cataclysme quotidien au-dedans de lui tous les jours mais dont j’ignore tout.

« L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. L’amour ne passera jamais. (1 Co 13, 4-8)

Pour terminer :
Imaginons un instant : si chacune de mes paroles étaient bienveillantes, si elles ne rayonnaient que la Bonté et la Miséricorde divine, si tous ces mots qui sortent de ma bouche n’étaient que pardon, charité, compassion, s’ils étaient louange incessante montant vers le Seigneur, s’ils savaient se faire silence pour écouter, regarder sans jugements, sans interprétation, si mes paroles savaient regarder, si elles étaient accueil, si mes mots n’étaient que paix, alors le monde serait sur le chemin de la vraie paix qui est le Christ.

FIN

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