Juridiction Franciscaine jusqu’en 1683. Puis juridiction de l’Ordinaire.

Notice

Ancien monastère de Varennes vers 1914

Le monastère de Varennes est fondé par un groupe d’Annonciades venues du monastère de Ligny-en-Barrois. Le 23 mars 1624, les représentants des habitants de la ville, réunis à « l’auditoire » ou tribunal de prévôt, donnent un avis favorable à l’établissement de ce monastère. Le père supérieur, ou Gardien, du couvent des Cordeliers de la ville se charge d’obtenir l’autorisation du duc de Lorraine pour une telle fondation – les Annonciades étant sous la juridiction des Frères Mineurs.

Le 12 décembre 1625, le Duc Charles IV autorise la fondation ainsi que l’acquisition d’une maison, située sur les terres du château de la ville ayant appartenu naguère à Catherine de Villers, protestante, qui avait obtenu une autorisation du Duc Charles III pour y résider.

Mais bientôt la Guerre de Trente ans fait ses ravages dans la région. En 1644, les Annonciades, inquiètes pour leur sécurité, prennent le parti de se retirer dans la forteresse de Clermont-en-Argonne. Elles adressent donc une supplique aux Magistrats de cette ville afin de leur demander asile. La ville de Clermont accepte. De son côté, l’Évêque François de Lorraine, alors réfugié à Cologne, donne son accord le 6 septembre 1644.

On ignore la date du retour à Varennes de la communauté. Mais  celui-ci a dû avoir lieu avant 1652-1653 car les comptes de la ville de Varennes signalent une aumône faite à « l’Annonciade de Varennes » avant ces dates.  Mais les Annonciades, en regagnant leur monastère de Varennes, laissent sur place quelques-unes de leurs sœurs. Ainsi, Clermont devient une nouvelle fondation.

Les revenus du monastère permettent à la communauté de vivre décemment. Le 21 mai 1629 – donc peu après la fondation – les religieuses déclarent à l’administration ducale les biens qu’elles ont acquis, disent-elles, « par le moyen des dotes des religieuses et par le fruit de leur travail économisé. » Cependant, en 1709 – année dont l’hiver fut particulièrement rigoureux –  le niveau de vie des religieuses est compromis. Louis XIV leur accorde alors une modeste somme de 100 francs.

Grâce aux Registres des vêtures et professions qui ont été conservés, on peut connaître l’origine sociale des religieuses. Les tourières viennent surtout des villages d’alentour. Les Professes ou religieuses de chœur sortent de la bourgeoisie voire de la noblesse terrienne.

Le monastère doit parfois recevoir des hôtes forcés. En 1724, une lettre de cachet y assigne à résidence Dame Perrette Rogier de Saint-Alexis, naguère religieuse à l’abbaye de Saint-Etienne, à Reims. En 1754, un ordre signé du comte d’Argenson fait sortir de l’Annonciade de Varennes la  sÅ“ur Gabouret, jadis supérieure de Saint-Aure, qui y avait été assignée à résidence elle aussi par ses supérieurs…. Ceci montre que le monastère de Varennes était considéré par la hiérarchie ecclésiastique comme un monastère régulier, sinon on ne lui aurait pas confié de tels « hôtes ».

Le 15 juillet  1649, le monastère acquiert des reliques, entre autres, quelque parcelle de bois du fuseau de la Sainte Vierge !

Les Annonciades vivent en clôture dans leur monastère. Elles travaillent de leurs mains. Elles possèdent un ouvroir où elles apprennent aux jeunes filles à coudre. Dans une aile du couvent, elles abritent et soignent des dames pensionnaires. Elles font aussi l’éducation d’une vingtaine de jeunes filles aisées.

Les Annonciades sont sous la juridiction des Cordeliers ; ce sont eux qui ont contribué à leur installation à Varennes. Mais  en 1683, Mgr Le Tellier, archevêque de Reims, apprend que des « désordres » se sont introduits dans le couvent de Varennes. On ignore la nature de ces désordres. Seraient-ils causés par la question du jansénisme et de l’affaire des formulaires ? Ces formulaires diffusés par un certain Nivelle au clergé afin de rallier celui-ci aux idées janséniste ? C’est possible selon un document des archives régionales de Varennes. Quoi qu’il en soit, le  6 septembre 1683, le provincial des Cordeliers de la Province de France parisienne  renonce à toute juridiction sur les Annonciades de Varennes.  Mgr Le Tellier donne alors aux religieuses un de ses vicaires généraux comme supérieur et comme aumônier un prêtre séculier.

En 1724 a lieu la construction d’une chapelle. Les habitants de la ville accordent aux religieuse à cette occasion 50 chênes. C’est un édifice d’une grande simplicité, de forme rectangulaire et dont la nef est éclairée par des fenêtres cintrées. Dans le monastère, on remarque la salle du chapitre, ornée de la statue de la Bse Jeanne de France, le réfectoire avec son lustre de cuivre doré, la bibliothèque comprenant une centaine de volumes, la salle de l’ouvroir. Au fond du jardin : l’humble cimetière. Le monastère possède aussi de vastes dépendances.  : pavillon des dames pensionnaires, remise, écurie, locaux pour la boulangerie, la buanderie, le fournil et la fruiterie.

En 1732, l’Évêque de Mitrie, auxiliaire de l’archevêque de Reims, visite le couvent et « trouve les pensionnaires bien élevées. » Mais il recommande aux religieuses le travail manuel et fait renforcer les grilles du chœur. L’année suivant, en 1733, il se déclare édifié « par le spectacle qu’offre la communauté. » La vie conventuelle s’écoule sans histoire jusqu’en 1790.

Le monastère peut loger trente moniales environ. En 1733, 28 professes y demeurent, avec 6 converses. En 1790, on ne compte plus que 19 religieuses de chœur.

Arrivent les événements de 1789. Le 10 mai 1790 a lieu l’inventaire du mobilier des Annonciades par  les officiers municipaux de Varennes. Le 30 octobre de la même année, les administrateurs du district de Clermont se présentent à leur tour, venant « offrir à ces recluses volontaires la liberté que la nation leur octroie. » Toutes les religieuses – 19 professes, 5 tourières – déclarent que leur intention « est de rester dans la dite maison et de continuer à mener la vie commune. »  Le 18 janvier 1791, les Annonciades déclarent aux officiers municipaux qu’elles sont décidées « à faire continuer les messes et service de leur église par un prêtre, qu’elles se chargent de rétribuer à leurs frais comme directeur, quoiqu’elles n’aient qu’une pension très modique et même insuffisante pour se procurer l’honnête nécessaire, aimant mieux se priver de la dépense que d’être privées d’un directeur ». La célébration de la messe est autorisée jusqu’à nouvel ordre.

Le 26 juin 1791 – quelques jours après l’arrestation de Louis XVI à Varennes – a lieu la procession de la Fête Dieu comme de coutume, escortée par la garde nationale en armes qui veut pénétrer dans la chapelle des Annonciades. Pour montrer sans doute leur opposition à l’Abbé Gaillet, le nouveau curé assermenté qui portait l’ostensoir, les religieuses ne paraissent pas à la grille du chÅ“ur. Les gardes nationaux sont furieux si bien qu’après la cérémonie ils envahissent en armes le monastère, brisant les vitres, les meubles. A ce bruit, la municipalité et le tribunal du district se réunissent en urgence. Pour donner satisfaction aux mutins, ils décident de faire sortir les religieuses de leur maison et de les répartir dans les familles de la ville qui voudraient bien les recevoir. Deux jours plus tard, la municipalité décide de les renvoyer dans leurs propres familles. Toutes reçoivent avant leur départ quelques provisions de route et un peu de linge. Ainsi, au bruit d’une émeute révolutionnaire se termine l’existence du monastère de Varennes.

Après le départ des religieuses, le bâtiment et ce qu’il contient est confié à la garde d’Etienne Radet, futur général d’Empire. En août 1791, les bâtiments et la chapelle sont vendus aux enchères. Le 18 août 1791 l’Assemblée Constituante attribue à la ville de Varennes le vaste immeuble des Annonciades. En  mars 1792, les bâtiments, après transformations, deviennent le siège du tribunal, de la gendarmerie et de la prison. Ensuite, divisés en quatre lots, les bâtiments sont vendus à des particuliers.  Au cours du XIXe siècle l’ancienne chapelle est transformée en remise. La guerre de 1914 a consommé la ruine des bâtiments.

Sources manuscrites

AD Meuse, 36 H 4, 1792, Plan du couvent de Varennes en Argonne.

AD Meuse 36 H 4, Photocopie du plan des caves du monastère Annonciade de Varennes.

AD Seine-Maritime, 35 H, Photocopie d’une « Copie tirée sur un Ms original » : Acte qui authentifie des reliques possédées par les Annonciades de Varennes, juillet 1649, septembre 1656.

A M Verdun, G.G. 172 f° 270

A.R.G. 275, Varennes.

Sources imprimées

Aimond Ch. (Mgr). Histoire de la ville de Varennes-en-Argonne, Bar-le-Duc, 1928. In-8°, 454 pp., avec dessins et 11 pl. hors-texte. Pag. 238-247 : II. Les Annonciades.

De Boislisle, Correspondance des contrôleurs généraux, Tome II, p. 671.

Martin Eugène (Chan.) Les trois Ordres de saint François dans la région lorraine, Paris, 1930.  P. 66 : Les Annonciades.

Robinet Abbé N., Pouillé du diocèse de Verdun, 1888, doyenné de Varennes, couvent des Annonciades.

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