Juridiction franciscaine, puis l’Ordinaire à partir de 1660.
Notice
La chronique du monastère d’Agen commence le 5 novembre 1533. Le couvent est fondé par un chanoine de la cathédrale Saint-Étienne et Saint Caprais d’Agen. Ce chanoine est vicaire général de l’Évêque, Mgr Vincent Bilhonis. Il a l’occasion, de part ses fonctions, d’entrer en contact avec le Provincial d’Aquitaine de l’Ordre des frères mineurs, le père de Saint-Félix dont la propre sœur est la mère Ancelle du couvent des Annonciades de Bordeaux. Les tractations d’une fondation s’amorcent et aboutissent. Le Provincial a bien connu le père Gabriel-Maria. Ce dernier, le 23 août 1516, l’avait nommé provincial d’Aquitaine alors qu’il était gardien du couvent de Bordeaux.
Les religieuses arrivent à Agen en janvier 1533. La première messe est célébrée dans le nouveau monastère le 11 janvier 1533. La première Mère Ancelle, élue par la communauté, le 5 novembre 1534, est sœur Louise d’Aventigny. Elle sera Ancelle durant 17 ans. Les autres sœurs fondatrices sont les sœurs Marie de Rochefort, venant d’Albi, Jeanne de Nuptiis, Françoise Favatière, Françoise de Montille, Jehanne d’Imbert et Gabrielle de Monléon. Toutes viennent d’Albi. Deux viennent de Bordeaux : sœur Jeanne de la Taste et sœur Françoise de Saint-Félix. Le monastère est placé sous la juridiction des frères mineurs.
Cinq sœurs du Tiers-Ordre de Saint-François vont se joindre à ce groupe. Celles-ci, en effet, attendaient la venue des Annonciades pour être reçues dans l’ordre de la Vierge Marie. Elles prennent l’Habit toutes ensemble le 25 novembre 1534. Ce sont les sœurs Philippe Martelle, Naudine de la Coste, Jeanne de la Brunie, Isabeau Bessouvre et Anne du Cast. La cérémonie est présidée par le Père Jehan Vernhandi, frère mineur et confesseur de la communauté d’Agen et, bien sûr, de la Mère Ancelle Louise D’Aventigny. Jusqu’en 1580, le monastère des Annonciades est le seul couvent féminin de la ville, d’où les nombreuses donations. La communauté comptera en moyenne 20 religieuses.
Premier événement marquant : les guerres de religion. En 1561, les Huguenots pillent les églises de la ville. Cela se passe dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre 1561. Celle des Annonciades n’est pas épargnée. Le 1er décembre les soldats envahissent le monastère et veulent obliger les sœurs à quitter leur habit. La communauté résiste. Alors, les Huguenots pillent l’église, détruisant les autels, les images puis s’en vont. Mais le 5 juillet suivant, ils reviennent à l’attaque et obligent la communauté à quitter les lieux. Il est trois heures de l’après-midi. Les sœurs partent sans rien emporter. Les soldats les dispersent chez les leurs espérant par ce moyen les contraindre à adopter leur doctrine mais elles résistent. Elles demeurent ainsi dispersées jusqu’au 13 août, jour où les Huguenots quittent la ville. Deux jours après, le 15 août, les Annonciades reviennent dans leur monastère.
L’année suivante, le 5 avril 1562, nouvelle attaque. Enfin, relevée de tous pillages et violences, la population d’Agen remercie Dieu d’y avoir mis fin. Il est alors institué une procession annuelle, chaque 10 août en la fête de saint Laurent : cette procession partirait de l’église cathédrale et irait jusqu’à l’église et couvent des Annonciades. La veille, la trompette annoncerait la procession. Au jour dit, grand-messe et prédication au couvent des Annonciades.
Si le monastère de l’Annonciade n’a plus à souffrir des malheurs du temps, en ces années 1565, il n’en est pas de même pour d’autres communautés de la région. En septembre 1569, le couvent de Paravis de l’Ordre de Fontevrault reçoit la visite de troupes d’Huguenots. Les soldats du capitaine de Marchastel pillent et incendient le couvent, forçant les religieuses à s’enfuir. Elles se dirigent alors vers Agen et demandent asile au couvent de l’Annonciade dit de l’Ave Maria. L’événement a lieu le 7 septembre 1569. Les 33 religieuses du couvent de Paravis arrivent donc à l’Annonciade d’Agen qui compte, lui, 20 moniales. Les religieuses Bénédictines vont demeurer environ cinq semaines à l’Ave Maria. Les deux communautés vont vivre ensemble, dans une très grande charité, moyennant quelques aménagements : les Bénédictines disent l’office dans le réfectoire des Annonciades tandis que ces dernières le disent, au même moment, dans leur chÅ“ur. Pour la messe, les Bénédictines la célèbrent dans le chÅ“ur des Annonciades, mais à un autre moment que celle de la communauté des Annonciades. Pour les matines, les Annonciades le disent à minuit, tandis que les Bénédictines le disent à 7 heures du soir, dans le chÅ“ur. Pour les repas, les deux communautés se retrouvent autour de la même table – les Bénédictines assurant même un tour de service et de lecture au réfectoire. Dix jours après l’arrivée de ces religieuses à l’Annonciade d’Agen, le couvent des bénédictines de Mont-de-Marsan est incendié, pillé, par les Huguenots. Les religieuses se dispersent alors dans des maisons de la ville, chez des amis, des parents. Quatre d’entre elles demandent à être hébergées chez les Annonciades d’Agen, ce sont les sÅ“urs Agnès de Claverie, 50 ans, Anne de Bordeneuve, 33 ans, Marie de Lucbardes et Françoise de Bordeneuve, 25 ans. Le 29 janvier 1571, elles demandent à prendre l’Habit de l’Annonciade, ce qui fut accepté.
Après la tourmente des guerres de religion la vie religieuse reprend son cours normal au couvent des Annonciades. Les entrées se succèdent. La chronique du monastère reproduit scrupuleusement la longue liste des novices et professes, depuis la fondation jusqu’à la fermeture en 1790. Quelques faits marquants :
1er juin 1622 : Louis XIII visite Agen ; il entend la messe au couvent de l’Ave Maria.
L’année suivante, 1623, le provincial de cette province d’Aquitaine, le père Grenier, donne comme obédience à une sœur du monastère, la mère de Saint-Tout, celle d’aller fonder un monastère de l’Ordre à Villeneuve sur Lot. Cette mère est accompagnée de trois autres religieuses : les sœurs Françoise de Laurièche, Marguerite Mauriac et Jeanne Picart. . Elles partent pour Villeneuve le 22 mars 1624.
En 1629, la peste sévit à Agen. Les Annonciades demeurent dans la ville ravagée par le fléau, restant sur place, malgré la permission qu’elles ont eue de sortir de leur couvent de la part du provincial et de l’évêque, afin de s’éloigner du fléau. Elles ont rendu plus d’un service en ces jours sombres.
En 1637, la communauté, est jusque-là dirigée par les Frères Mineurs de la régulière Observance. Les pères sont presque tous italiens. Des abus voire des licences se produisent de la part de ces religieux, jetant le trouble dans la communauté qui décide, alors, de se mettre sous la juridiction de leur évêque, monseigneur d’Elbène. Les pères cordeliers vont résister, si bien que la communauté ne passera effectivement sous la juridiction de leur Ordinaire que le 10 janvier 1660.
1632 voit la construction d’une nouvelle chapelle, tandis que 1656, la refonte de la grande cloche du couvent. La bénédiction de cette cloche a lieu le 3 janvier 1658 et reçoit le nom de « Marie ». Malheureusement, elle se fêle le 28 mai 1730. Le couvent la fait aussitôt refondre et la bénédiction de cette nouvelle cloche a lieu le 2 juillet de la même année. En 1668, des travaux sont effectués dans le monastère : porte du dortoir, escalier menant à ce même dortoir.
En 1686, l’Évêque d’Agen, Mgr Mascaron, procède à la visite canonique du monastère. Il rencontre en particulier toutes les religieuses au nombre de 32 sÅ“urs de chÅ“urs, de 6 sÅ“urs converses. Il y a également 6 pensionnaires âgées de 10 à 17 ans. L’Ancelle se nomme Louise de Macy. À cette époque, les biens de la communauté sont constitués en partie d’un château avec terres, de vignes et de bois, de deux moulins, d’un foulon, d’une métairie… Le 20 février 1692, a lieu une autre visite canonique, toujours par Mgr Mascaron. En 1703, il autorise la communauté à faire construire un chÅ“ur et une sacristie.
En 1734, l’existence du monastère est menacée. En effet, le cardinal Rohan de Soubise, grand aumônier du Roi, trouvant trop nombreux les couvents de France, propose d’en supprimer plusieurs par voie d’extinction – c’est-à -dire que la communauté n’a plus le droit d’accueillir des novices. Les Annonciades d’Agen et les religieuses de Notre-Dame de Paulin étaient du nombre. Mais ce projet n’a pas eu de suite et les Annonciades comme les religieuses de Notre-Dame ont continué à exister jusqu’à la révolution.
Le 26 mai 1743 a lieu dans l’église du monastère la commémoration de la béatification de sainte Jeanne de France. Le bref pontifical de la béatification est lu solennellement par monsieur Gardès, chanoine de la cathédrale Saint-Étienne, délégué par l’évêque, au pied de l’autel. Puis, Te Deum, bénédiction du Saint-Sacrement. Le lendemain, le chapitre de Saint-Étienne est venu chanter la grand-messe au monastère de l’Annonciade, le matin, et l’après-midi les vêpres. Les personnalités de la ville assistent à ces deux cérémonies. De même, en ce jour, le père Massonneau, jésuite, prononce le panégyrique de la sainte. Plusieurs processions ont lieu : celle du chapitre de Saint-Étienne, celle des pénitents. Le Père de Moncaut, carme, donne un panégyrique sur la nouvelle sainte. Le troisième jour a lieu la bénédiction du Saint-Sacrement aux Annonciades, par le chapitre de Saint-Capray. La bannière de la sainte est placée dans l’église du monastère au chant du Te Deum, chanté par le chapitre de Saint-Étienne et par la communauté. En ces jours, il y a une grande affluence de personnes. L’église du couvent est richement parée. La sœur sacristine a aussi donné un repas à plusieurs prêtres.
Après ces cérémonies, la vie conventuelle reprend son cours. Viennent alors les événements révolutionnaires. En 1789, tous les couvents de France sont appelés à nommer un député qui les représenterait dans la réunion par province, cela, afin de rédiger les cahiers de plaintes et de doléances. Ainsi, le 3 mars 1789, la communauté se réunit au chapitre afin de procéder à l’exécution de la lettre du Roi du 24 janvier 1789, afin de procéder à la nomination d’un député, représentant de la communauté. Les religieuses ont choisi, pour les représenter en l’assemblée générale du Tiers État, Monsieur de Parades, prêtre de l’Oratoire.
Le 9 juillet 1790, la communauté reçoit le commissaire du district d’Agen qui vient procéder à l’inventaire des biens. Interrogées ensuite sur leurs intentions, la plupart des sœurs disent vouloir rester dans leur couvent. Quelques-unes disent ne pas vouloir s’expliquer. Elles ont pu rester sur place jusqu’au 31 août 1792, date de leur expulsion. Le monastère est vendu le 2 septembre 1792 à un certain monsieur Carmentran, administrateur du directoire du district. Bientôt, le vaste emplacement du monastère de l’Ave Maria est divisé en lots vendus à des particuliers. Actuellement, une chapelle de la ville est dédiée à sainte Jeanne de France.
Sources manuscrites
Archives Départementales du. Lot‑et‑Garonne, fonds de Raymond, manuscrit n° 152, F 2 (17e siècle).
Sources imprimées
Diverses revues ayant consacré un article sur le monastère d’Agen  : Revue de l’Agenais, t. 17, p. 15-50 et 121-139 ; Archives historiques de la Gironde, t. 28, p. 151 ; Revue d’Histoire Franciscaine (=RHF), t. 3, 1926, p. 399, 404, 540 ; tome 4, 1927, p. 357, tome 5, 1928, p. 165 ; tome 8, 1931, p. 69, 72, 74 – France Franciscaine (=FF), tome 4, 1921, p. 308-310, 312, 316, 320, 321 ; tome 5, 1922, p. 153, 154, 167, 169, 421, 422.
Lauzun Philippe, « Les couvents de la ville d’Agen », Revue de l’Agenais, t. 17, 1890, p. 15-50, 121-139.
Lauzun Philippe. Les couvents de la ville d’Agen avant 1789, tome 2, Agen, 1893, Ch. 2 : Les Annonciades (p. 29-74).
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