Mère Marie de Saint-François d'Assise, ovmLe 13 août 1911, une petite Suzanne vient faire la joie de monsieur et de madame Siraudeau, vendéens d’origine,  demeurant en région parisienne, à Vincennes, dans un quartier du  Nord-Est de la ville, sur la paroisse de Notre-Dame. Suzanne est l’aînée des enfants : derrière elle il y a Albert puis  Madeleine.

À l’époque, la paroisse Notre-Dame de Vincennes compte 50 000 habi­tants. Plus de 5 000 Vincennois pratiquent régulièrement le dimanche à l’église Notre-Dame qui regroupe environs 90 Å“uvres ou mouvements divers. Deux écoles paroissiales et un collège tenus par des religieuses sont florissants. 200 enfants font chaque année leur « communion solennelle » ; un patronage de garçons et un patronage de  filles sont fréquentés par des centaines de jeunes. Le scoutisme est en plein essor. Un curé et cinq vicaires dispensent un enseignement catéchétique de qualité. Dans le sillage des orientations de Pie X, le culte eucharistique s’intensifie. L’action catholique, sous l’impulsion du père Cardjin porte ses  fruits. C’est dans ce contexte que grandit Suzanne.  Cela l’a certainement préparé à accueillir le passage de Dieu en sa vie, par l’intermédiaire de la Vierge. À 16 ans, en effet, lors d’un pèlerinage à Lourdes, Suzanne rencontre le regard de l’Immaculée ; elle comprend dans l’intime de son cÅ“ur que la Vierge lui fait signe de suivre le Christ, son Fils. Deux ans vont s’écouler avant le don total.

À 17 ans, elle devient « zélatrice » d’un groupe de garçons  de la croisade eucharistique, d’où sortiront au moins deux prêtres. À ces influences vincennoises, il faut ajouter celles du petit séminaire franciscain de Fontenay-sous-Bois, foyer spirituel évident. Parmi ses élèves, se trouve son frère Albert, futur franciscain. Elle y fait la connaissance de son père spirituel, le père Remy Leprêtre. Elle lui confie son désir de se donner totalement au Christ. Familière donc de ce milieu franciscain, Suzanne pense tout naturellement à entrer chez les clarisses de Paris. Le père Remy Leprêtre l’en dissuade, ayant certainement compris la grâce mariale qu’elle a reçu. Il la dirige donc vers l’Annonciade, dont il connaît les origines franciscaines et la spiritualité centrée sur le Plaisir de Dieu par  l’imitation de la Vierge.

À 19 ans, le 14 août 1930, elle entre donc au monastère de l’Annonciade, situé à Thiais, à l’est de Paris. La même ancelle de l’époque, mère Marie-Emmanuel Agnéray a très vite saisi la valeur humaine et spirituelle de la jeune postulante. Connaissant ses affinités avec saint François, elle a la délicatesse de lui donner, à l’issue de la cérémonie de prise d’habit, le 19 février 1931,  le nom de sœur Marie de Saint-François d’Assise. Après sa  profession temporaire le 26 avril 1932 et sa profession  perpétuelle le 24 mai 1935, un long chemin s’ouvre devant elle. Les divers emplois qui vont lui être confiés la préparent petit à petit à sa future vocation d’ancelle et de fondatrice. Entre 1935-1950 elle va être, tour à tour, assistante, chargée du noviciat et, surtout, secrétaire particulière de mère Marie-Emmanuel. Celle-ci, devenue aveugle, décide en 1950 de donner sa démission d’ancelle. C’est alors que sœur Marie de Saint-François d’Assise est choisie par la communauté pour la remplacer dans cette charge, le 12 septembre 1950. À partir de cette date, mère Marie de Saint-François d’Assise donne toute sa mesure.

Sous son impulsion, l’ordre va être mieux connu et s’étendre. De 1950 à 1957 – date du décès de mère Marie-Emmanuel – mère Marie de Saint-François fait preuve de beaucoup de tact, de délicatesse envers son ancienne ancelle, recourant beaucoup à ses conseils et avis. L’union des monastères lui tient à cœur. Entre 1957-1960, elle prend son bâton de pèlerin et fait plusieurs voyages en Belgique, visiter les trois monastères belges, ainsi que les congrégations Annonciades apostoliques. Elle a à cœur également de garder et d’intensifier les liens avec les Fils de saint François : confesseurs, prédicateurs  sont sollicités pour les besoins spirituels de la communauté. Vient la période du Concile. Mère Marie de Saint-François, avec les autres ancelles bien sûr,  est au cœur des travaux d’aggiornamento demandé par l’Église à tous les Instituts religieux. Ses conseils sont recherchés. Les travaux de mise à jour des Constituons de l’ordre se clôtureront par l’approbation définitives de ces Constitutions, le 24 septembre 1984.

À cette date, mère Marie de Saint-François a commencé sa tâche de fondatrice depuis déjà quelques années. En effet, le 4 août 1975, a lieu la première fondation du monastère de Thiais, à Brucourt, en Normandie. Cinq ans plus tard, le 3 janvier 1980, une  seconde fondation voit le jour, dans les Alpes de Haute-Provence, à Peyruis, puis une troisième, le 16 juillet 1988, celle de Saint-Doulchard. De plus, mère Marie de Saint-François va envoyer un groupe de sœurs renforcer le monastère de Villeneuve-sur-Lot et va offrir aux moniales de St.-Margaret’s, obligées de fermer leur monastère, un accueil fraternel.

De 1970-1981, mère Marie de Saint-François participe,  comme membre actif, aux réunions du Service des Moniales – ce qui insère le monastère d’une manière plus particulière dans la vie de l’Église. C’est sous son influence qu’a lieu également, une simplification des us et coutumes du monastère, en vue de permettre à la communauté d’être plus apte à assumer d’autres formes d’austérité que celles suivies jusqu’ici,  telle celle d’un rythme de travail plus serré, plus contraignant, tout en ayant soin de veiller à l’intégrité des exigences de la vie contemplative : prière, travail, silence, clôture, vie fraternelle.

À propos des relations que mère Marie de Saint-François entretient,  il est important de dire combien, en fidélité au charisme de l’Annonciade, elle a le souci de garder et de favoriser des liens avec les Frères Mineurs : confesseurs, prédicateurs sont sollicités, pour les besoins spirituels de ses sœurs. Il faut signaler aussi les contacts qu’elle a favorisés avec deux Congrégations religieuses. La première, celle des Pères Mariens de Pologne fondés par le bienheureux Stanislas Papczyński (1631-1701), une Congrégation qui a reçu la Règle de l’Annonciade comme fondement de sa spiritualité. La seconde : ce sont les Congrégations d’Annonciades apostoliques de Belgique fondées par l’abbé Pierre-Jacques De Clerck (1742-1831) à la fin du 18è siècle. La Règle de l’Ordre de la Vierge Marie est aussi la base de leur spiritualité. Durant le supériorat de mère Marie de Saint-François les relations fraternelles avec ces Sœurs Annonciades se sont intensifiées.

Arrive 1996. Mère Marie de Saint-François avance en âge. En cette année, elle prend l’importante décision  de donner sa démission. C’est alors que mère Marie du Christ est élue ancelle, le 10 octobre 1996. Durant les neuf années qui lui restent à vivre, mère Marie de Saint-François va être, pour la nouvelle ancelle comme pour chaque sœur du monastère, pour l’Ordre, une présence d’où rayonne la grâce de Dieu. En 2002, elle participe au colloque de l’Institut catholique de Paris, « Jeanne de France et l’Annonciade », organisé à l’occasion du cinquième centenaire de la fondation de l’Annonciade. C’est pour elle l’occasion de présenter cinquante ans d’histoire contemporaine : celle de son monastère et de son ordre à laquelle elle a été si intimement mêlée.

Les deux dernières années de sa vie, 2003-2005, sont une véritable agonie morale que la perte progressive de la parole vient accroître. Elle vit cela dans une foi et un abandon admirables. Au milieu de sa nuit, elle manifeste à ses filles beaucoup de tendresse et celles-ci ne savent pas quoi faire pour venir au secours de sa souffrance. Le 28 mai 2005, jour de l’anniversaire de la canonisation de sainte Jeanne, elle reçoit le sacrement des malades ; alors, un apaisement a lieu. Elle meurt, entourée de ses filles, doucement, son grand regard posé sur elles en signe d’adieu, le 29 novembre, jour de la Toussaint séraphique. Sainte Jeanne et saint François ont été présents à sa Pâque.

 

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