Juridiction des Frères Mineurs
Notice
Un groupe de sœurs Annonciades du monastère du Petit-Vaugirard, à Paris, s’installe à Fécamp en 1648. Le fondateur est Jacques Berruyer, conseiller d’État au parlement de Rouen. Le contrat de dotation est passé le 28 mars 1648 ; l’autorisation de la fondation est signée le 2 juillet 1648. L’autorisation royale ou lettre patente du roi arrivera en 1651. Les religieuses sont sous la juridiction spirituelle des Cordeliers, mais soumises à la juridiction temporelle de l’Abbaye de Fécamp. Une situation qui n’est guère simple.
En peu de temps la communauté compte 50 moniales. Elles habitent d’abord rue de Mer, paroisse Saint-Etienne. En 1649, elles demeurent rue de l’Hôpital, paroisse Saint-Fromond. En 1756, la communauté se transporte dans une propriété dite “ Pré-Fontaine ”, rue de la Barricade. Elle y restera jusqu’à la Révolution française.
Les sœurs fondatrices du monastère de Fécamp sont Barbe de Pullenoy, ancelle ; Jeanne de la Croix, vice gérante ; Marie Madeleine de Jésus, conseillère ; Angélique de Sainte-Elisabeth, conseillère.
Au moment de la fondation, le Prieur de l’Abbaye de Fécamp est Dom Aymard de Fontaines des Érables. L’Abbaye dépend du Saint Siège. Le vicaire général de Monseigneur Henry de Bourbon, Evêque de Metz, prince du Saint Empire, est l’Abbé commendataire de cette abbaye.
En 1651, les religieuses reçoivent la permission de demander à Rome les dispenses nécessaires afin de continuer leur vie conventuelle sous la direction de l’Abbé de Fécamp. Mais l’année suivante, en 1652, la communauté demande à être sous la seule conduite des Cordeliers. L’autorisation est accordée par le père Marc Bastide, prieur de l’abbaye de Fécamp, à condition que les Annonciades aient vis à vis de l’abbaye les mêmes devoirs qu’elles doivent avoir envers les Évêques.
En 1665, le 6 juillet, a lieu la guérison d’une jeune fille de 12 ans, Cécile de Boudeville, pensionnaire au monastère. Paralysée, elle est guérie par l’intercession de sainte Jeanne, au terme de trois neuvaines. En 1741, le père Mareuil, jésuite, dans sa biographie consacrée à la sainte rapporte ce miracle.
En janvier 1730, soeur Catherine Berry est Ancelle. Quelques notes concernant le temporel du monastère, à cette période :
– Pour les aumônes, 100 boisseaux de blé par an avec 30 livres d’argent sont réservés.
– Trois fois la semaine, du potage est distribué aux pauvres, à savoir une écuellée pour 60 pauvres.
– Six heures de prière au chœur par jour. Comme travail, les sœurs filent des toiles. Les revenus sont en partie employés pour l’entretien de l’église et de la communauté.
– Les confesseurs sont des pères franciscains de l’Observance ; les sœurs pourvoient à leurs besoins.
– Le monastère possède des fermes. Le couvent n’est composé que de petites chaumières et maisons particulières que les sœurs ont du mal à entretenir si bien qu’elles seront presque en ruine au moment des événements révolutionnaires.
En 1739, des difficultés surgissent dans la communauté : une partie veut passer sous la juridiction de l’abbaye de Fécamp, tandis que l’autre veut rester sous la juridiction des Cordeliers. Que s’est-il passé ?
En 1739, les Annonciades de Fécamp se trouvent toujours sous la juridiction des Franciscains. Mais, pour rester sous le gouvernement franciscain, elles ont dû faire appel à des Pères de Rouen, Fécamp n’ayant pas de couvent Cordelier. Cela a occasionné à la communauté, qui paraît assez pauvre, des frais supplémentaires : frais de voyages, entretien, logement des Pères etc. De plus, des rumeurs courent concernant certaine mauvaise influence spirituelle de la part des Pères sur la communauté. Est-ce- fondé ? On peut en douter, vu la suite. Elles vont donc demander à l’Abbé de Fécamp de passer sous sa juridiction. Mais, les Pères franciscains, à qui elles doivent toujours obéissance, ne vont pas accéder à leur demande. De plus, ils mettent le doigt sur une influence néfaste que la communauté aurait eue de la part d’une de leur pensionnaire.
A cette époque, c’est la Mère de La Fontelès qui est Ancelle du monastère. En mai 1739, son monastère reçoit donc la visite du Père Provincial de France Parisienne, Jacques André Ruel, frère mineur observant. L’Ancelle et ses conseillères refusent de le rencontrer. La communauté est divisée en deux tendances : la Mère Ancelle et les conseillères voulant passer sous la juridiction de l’Abbé de Fécamp ; un certain nombre de religieuses voulant rester sous le gouvernement des Franciscains.
Le Père provincial visite cependant le monastère, exhorte l’ensemble de la communauté à l’union et à la paix. Au cours de cette exhortation, l’Ancelle et quelques sœurs vont alors s’opposer à leur Provincial devant toute la communauté. Bouleversées, certaines sœurs vont alors demander au père pardon pour leurs sœurs.
Afin de rétablir la paix dans la communauté, le Père Provincial suspend la Mère Ancelle de ses fonctions, du moins pour un temps, et il demande à la soeur Anne de Roesse, qui remplace provisoirement l’Ancelle, de faire sortir du monastère une pensionnaire anglaise, Madame Digier, car il s’est aperçu que la division de la communauté provenait de cette personne, de sa mauvaise influence sur la communauté. Puis, il demande aux sœurs de garder l’unité envers et contre tout, et de n’accepter pour confesseur que celui nommé par la province dont elles font partie. Le procès verbal de cette visite est remis à la Mère Ancelle de La Fontelès, le 23 mai 1739.
Après cet orage, tout est rentré dans l’ordre ; le monastère est resté sous la juridiction des Frères Mineurs jusqu’à sa fermeture survenue au cours des événements révolutionnaires de 1789.
En 1758, les Annonciades de Monfort-sur-Risle sont dans un tel état de pauvreté que la vie conventuelle n’est plus possible. En octobre 1749, il ne reste que trois soeurs de choeur. Dix ans s’écoulent. En 1758, les trois soeurs se retirent dans d’autres monastères : une chez les cordelières de Bernay, les deux autres comme pensionnaires chez les Annonciades de Fécamp. Ce sont les soeurs d’ivry de Sainte-Cécile et Marguerite Grouard de Saint-Jean.
Arrive la période révolutionnaire. En 1790, la communauté compte 20 sœurs de chœur, 7 converses. Soeur Desportes est Mère Ancelle. Au moment de l’abolition des vœux monastiques et des interrogatoires sur les intentions des religieuses, 24 sur 27 veulent rester dans leur monastère, y mener la vie commune. Malgré cela, elles sont obligées de se disperser.
Le 19 février 1790 a lieu l’inventaire du monastère par les officiers du gouvernement révolutionnaire.
Le monastère et l’église sont vétustes. La communauté possède des fermes avec rentes ; des terres avec loyers. Le couvent possède aussi des objets de valeur comme des tableaux, des objets de culte en argent. La bibliothèque compte 160 volumes environ. Le 11 mai 1790 a lieu un second inventaire, celui de la cuisine, de l’infirmerie, du dortoir aux 20 cellules.
Sous la Terreur, en 1793, on procède à la vente du mobilier. Le couvent devient alors hôpital militaire, puis il est vendu à des particuliers. Une fois dispersées, plusieurs sœurs vont prêter serment. Celles-ci ont pu recevoir de la part des personnes qui les ont hébergées des influences « civiques » et « patriotes ». Plusieurs, au moins sept, refusent toutefois de prêter ce serment. Elles sont alors emprisonnées à l’Abbaye de Granville, district de Montivilliers, avec d’autres religieuses comme les Bénédictines hospitalières de Fécamp. Plusieurs sœurs tombent malades en prison. Elles sont libérées en 1795. Deux des religieuses incarcérées deviennent une fois libérées religieuses hospitalières à l’hôpital Saint-Antoine de Fécamp.
La vie spirituelle de la communauté s’est nourrie de la méditation des vertus de la Vierge Marie, et de l’adoration du Saint-Sacrement, aux grandes Fêtes liturgiques.
Enfin, de 1648 à 1792, 13 Ancelles se sont succédé.
Archives manuscrites
Archives Départementales Seine-Maritime (Rouen), série G, 827 à 840 ‑ G 5516, 5517, 5521, 5542 ; série H manuscrit 5 7 H, 7 6 H … ; série L 257, 1231, 3390 – Bibliothèque Municipale de Fécamp : registre concernant les Annonciades de Fécamp.
Archives imprimées
« Annonciades en Normandie avant la Révolution », Message Marial, janvier 1990, n° 133, p. 12-14.
« Annonciades en Normandie, hier et aujourd’hui », Annonciade hier et aujourd’hui, Journée d’étude, Centre d’études théologiques de Caen, Brucourt, 2003, p. 91-128.
Banse Daniel, Vieux Fécamp. Les Annonciades, Fécamp, Imprimerie Banse frères, 1913/1918, 42 pages.
Bellamy Dom, osb, « La Vie religieuse à Fécamp sous la Révolution », Recueil de l’Association des Amis du Vieux Havre, 1990
Bellamy Dom, osb, Bénédictines et Annonciades à Fécamp sous la Révolution, Association des Amis des Musées Municipaux, Fécamp, 1989.
Blain, chanoine, Vie du vénérable serviteur de Dieu J.-B. de la Salle, instituteur des frères des écoles chrétiennes, 1733.
Decultot Gilbert, Fécamp, L. Durant et Fils, Fécamp, 1979.
Description géographique et historique de la Haute Normandie, t. 1., 1749.
Lecroq Dom Gaston, Les Annonciades de Fécamp, Durand et Fils, Fécamp, 1947.
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