« Rien d’ici-bas n’est aussi pur que l’âme de Marie.
Un océan de cristal sous le soleil de midi » (frère Davis osb)
Pour sainte Jeanne et le bienheureux père Gabriel-Maria, les vertus sont considérées comme des « plaisirs », comme des actes qui réjouissent le cœur de Dieu. Pour eux, les vertus ne sont pas semblables à des personnes rébarbatives, mais elles ont quelque chose d’heureux, de léger, un je-ne-sais-quoi de simple. Quand ils en parlent ils emploient volontiers une image musicale : l’un les appelle le psaltérion à dix cordes, l’autre, la harpe de la vie. C’est dire tout leur dynamisme, propre à faire émerger le meilleur de soi quand on commence à jouer sur leur clavier, non pour devenir quelqu’un de bien, mais pour faire ce qui plaît à Dieu, ce qui fait sa joie. Voilà pourquoi, il a été trouvé bon de revisiter l’itinéraire des vertus proposé par l’Annonciade en faisant appel aux musiciens.
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La Vierge est sans partage, pure, simple. Elle vit sans s’en apercevoir en présence de Dieu. En toute circonstance, elle discerne sa Présence. Elle vit d’une manière exemplaire la béatitude des cœurs purs: «Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu» (Mt 5, 8). Comme Marie, nous pouvons nous aussi « voir Dieu », toucher son action, pressentir sa Présence dans notre vie, au cœur même de notre quotidien. Car Dieu a rejoint la Vierge dans son quotidien, à Nazareth. Et nous aussi nous avons notre Nazareth, ce lieu où Dieu même nous rejoint et nous appelle à donner le meilleur de nous-mêmes.
Le cœur pur de Marie
Il y a des musiques qui portent à l’intériorité ; il y a des musiques qui éveillent en nous le meilleur de nous-mêmes, qui attisent notre soif d’absolu, notre désir du beau. Il y a des musiques qui font penser à Marie. Telle celle d’Arvo Pärt. Sa musique suscite une réelle impression de pureté, d’intensité recueillie. En cela, elle dit quelque chose de l’être de Marie. C’est une musique très épurée. Cette impression est due par le choix qu’il fait d’utiliser dans ses compositions des rythmes simples – jeu d’un instrument entre trois notes principales par exemple – ou bien des notes récurrentes qui donnent à sa musique une impression de stabilité ; ou bien encore, absence ou peu de modulations. Tout cela contribue à créer un climat de contemplation et d’intériorité.
« Je pourrais comparer ma musique, dit-il, à une lumière blanche dans laquelle sont contenues toutes les lumières. Seul un prisme peut dissocier ces couleurs et les rendre visibles : ce prisme pourrait être l’esprit de l’auditeur ». Il dit encore : « j’ai découvert qu’une seule note suffit quand elle est bien jouée ». Marie n’est-elle pas cette « lumière blanche » dans laquelle sont contenues toutes grâces et tous biens? « Réjouis-Toi pleine de grâce » lui dit l’Ange de l’Annonciation. N’est-Elle pas encore cette « note » unique que l’Esprit Saint fait vibrer incomparablement ? « L’Esprit Saint viendra sur Toi et te prendra sous son Ombre » lui a dit encore l’Ange de l’Annonciation.
Notre meilleur modèle
Regarder Marie, la prier, éveille en nous le désir de la véritable pureté. On sent monter en soi le désir de se tourner vers la lumière, de se tourner vers Dieu qui est la source de tout Bien. La pureté ? Chacun en rêve comme quelque chose d’impossible, comme un idéal inaccessible ! Et pourtant, c’est possible. La vie de Marie nous le dit. Suivre son exemple nous en ouvre l’accès. Marie n’a pas mis d’obstacle à l’action de Dieu en sa vie, Elle lui a soumis toute son existence. Elle a fait confiance, à l’Annonciation et dans tous les événements qui ont suivi : elle n’en connaissait ni le sens ni la portée, mais elle a consenti, n’ayant rien d’autre à donner « que le trésor de son oui ». Sa vie nous dit qu’un cœur pur est sans partage, il se donne tout entier, cherchant en tout à plaire à Dieu, s’ajustant à ce qui Lui plaît. Un cœur pur est simple : pas de calcul, pas de mensonge, ni de faux-semblant. Il est sans arrière-pensée.
Surmonter les défis
« Toutes ses inclinations se soumettent au désir des vertus, simplement pour plaire à Dieu. Elle ne consent jamais à prendre plaisir en des choses vaines et transitoires. Elle refuse tout ce qui pourrait empêcher la pureté de son cœur. Elle prend toute sa consolation à faire le bien qu’elle peut pour l’amour de Dieu ; elle conduit toujours les autres à bien faire et à se réjouir du bien que l’on fait… »
Telle est la feuille de route que le bienheureux Gabriel-Maria donne à toute personne assoiffée de pureté afin de l’aider à surmonter les défis que cela suppose. La pureté ? Chacun en rêve comme d’un sommet inaccessible ! Et pourtant, ce sommet est atteignable ! Marie nous en ouvre l’accès. Sa vie montre ce que dira saint Augustin dira, à savoir que la « pureté ne consiste en rien d’autre que de tenir son regard constamment fixé sur Dieu et de lui soumettre toute sa vie. » Ainsi Mare. Et nous ? Si la pureté du cœur est « oui » à Dieu, nous savons bien que nous avons aussi à dire « non » aux tendances mauvaises qui nous habitent. Aimer d’un cœur libre suppose un combat contre les séductions de l’égoïsme jouisseur et tout ce qui peut ternir ou troubler notre conscience.
Pour mener notre combat de la pureté, l’Église nous recommande la pratique des Sacrements, et la prière, en particulier la prière du Rosaire. Il est bien certain que nous ne pouvons, par nos simples forces, résister aux multiples tentations de la société actuelle. Alors, demandons le secours de Marie, et des saints que nous aimons. Chacun de nous est un peu responsable de la pureté de l’atmosphère dans laquelle on vit ! Notre effort à nous, c’est de veiller sur nous-mêmes afin d’éviter les occasions de pécher : Il y a des spectacles à ne pas regarder, des conversations à éviter, des propos qu’on ne doit pas se permettre : d’une part pour ne pas troubler notre conscience, mais aussi pour ne pas troubler celle d’autrui. Et parce que nous sommes chrétiens, tout simplement !
Il est donc nécessaire de passer du temps avec le Seigneur, de contempler son visage et son action dans votre vie. Il est constamment à l’œuvre en nous, mais nous devons être attentifs. Une excellente façon de le faire est de Le rencontrer dans l’adoration eucharistique. C’et un lieu propice à recevoir force et courage, paix et charité. La vie de prière rend notre cœur chaque jour plus pur, notre vie plus sainte.
La soif du Beau
Pour que notre vie puisse laisser pressentir quelque chose de la Beauté de Dieu, il faut faire comme en musique, « Il faut beaucoup travailler, connaître à fond les règles de l’art qu’on veut cultiver…. Or, pour travailler efficacement, en admettant qu’on possède déjà les principaux éléments de l’harmonie, il est, non seulement utile, mais nécessaire d’étudier les œuvres des hommes de génie, soit en les entendant, soit en les lisant. Il faut, de plus, se rendre compte des procédés qu’ont employés ces hommes pour arriver aux effets qui nous frappent […. ] Quant aux procédés pour trouver soi-même des mélodies ou des combinaisons vraiment belles il n’y en a pas. Ils ne peuvent être enseignés méthodiquement. Mais, par l’étude du Beau, on peut arriver à découvrir en soi-même un feu qu’on ne connaissait pas et qui est l’inspiration », qui est l’Amour du Beau prenant corps dans une création musicale. Car « la flamme créatrice ne trouve son véritable aliment que dans l’amour, et dans le fervent enthousiasme pour la Beauté, la Vérité et le pur Idéal » (Vincent d’Indy).
Ce que dit Vincent d’Indy peut se transposer dans le domaine spirituel. L’attrait d’une vie pure, en effet, l’attrait d’une vie simple et belle, cela demande beaucoup de travail sur soi. Prendre la Vierge comme guide, cela peut aider. Lire la vie des saints, cela peut également aider. Cela demande aussi d’être attentif à ce « feu » intérieur qui brûle en nous depuis notre baptême, d’être attentif aux bonnes inspirations que l’Esprit Saint éveille en nous : la prière, la réception des sacrements, la fréquentation de la Parole de Dieu, de la vie des saints, tout cela peut nous y aider. Et puis, si d’aventure nous prenons la Vierge comme guide et modèle de nos existences, alors sur nos chemins de vie si compliqués, parfois si obstrués et obscurs, brillera une douce et pure lumière. Marie nous fera comprendre que « tout est possible à celui qui croit ».
En résumé
Il est important de se laisser attirer par ce qui est pur, par ce qui est beau. Demandons le secours de Marie et des saints que nous aimons car chacun de nous est un peu responsable de la pureté de l’atmosphère dans laquelle on vit ! Ce qui est beau et pur, nous pouvons certes le goûter dans l’art, mais aussi dans la contemplation de la nature, dans un beau livre, dans l’amitié, dans nos relations familiales faites de délicatesse, d’attention mutuelle, d’écoute, de prévenance, dans l’amour du travail bien fait, dans le don de soi au quotidien etc., tout cela contribue à réveiller en nous ce feu intérieur qui brûle en nous depuis le jour de notre baptême et qui ne demande qu’à se propager pour rendre plus belle notre vie et, par le fait même, la vie de notre prochain.
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