Juridiction des Frères Mineurs, sous l’Ordinaire à partir de 1695

Notice

Les Annonciades s’installent à Rouen en 1644 ; elles habitent d’abord sur la paroisse Saint-Nicaise ; en 1648, elles se fixent sur la paroisse Saint‑Vivien, dans le fief du Mont, autrement appelé: « Champ Hérisson ». Ce fief s’étendait jusqu’à la Porte de Saint Hilaire.

Les Annonciades sont gouvernées par les Cordeliers. Or, en 1646, deux ans après leur arrivée à Rouen, s’élève un conflit entre la mère Ancelle, une moniale et les deux sœurs Cantelles : les premières voulant passer sous l’Ordinaire du lieu, les sœurs Cantelles voulant rester sous la juridiction des Cordeliers. S’ensuit un procès qui se termine en 1650 par un arrêt en faveur des sœurs Cantelles. Le parlement de Rouen ordonne en effet que toutes les religieuses soient réunies dans une même maison sous la direction des Pères Cordeliers. L’affaire n’en reste pas là. Il va y avoir alors comme deux monastères d’Annonciades à Rouen durant quelques années : celui, dans une maison particulière, des sœurs voulant rester sous l’Ordinaire, et celui, dans les bâtiments conventuels, de celles voulant rester sous la juridiction des Cordeliers. Les années passent. En 1695, Rome se prononce finalement pour la juridiction de l’Ordinaire.

En 1653, la chapelle est achevée et bénie sous le vocable de Saint-Jean, en présence des Pères Cordeliers de la Province de Paris. La fête titulaire est celle de l’Annonciation et de Notre-Dame des Dix Vertus de la Sainte Mère de Dieu.

Les Annonciades ont des pensionnaires, la plupart des filles de la noblesse ou de la bourgeoisie de la ville. La communauté est pauvre et a du mal à vivre. En 1729 on lit sur les registres de la communauté, au chapitre des charges : « réparation de notre clôture et des maisons que nous louons ; une église qui menace ruine ».

Sous l’Ancien Régime, notamment au 18è siècle, les communautés du diocèse de Rouen ne vivent pas dans l’opulence, surtout les couvents féminins. Les religieuses connaissent des difficultés matérielles : en 1746, l’archevêque de Rouen observe en effet qu’elles « meurent de faim ». Certains monastères sont supprimés en 1732 et 1743, d’autres reçoivent des secours, tous ont recours à des expédients : pensionnaires, « dames retirées », etc. Aussi, le revenu global de bon nombre augmente, surtout après 1750. En fait, ces accroissements proviennent essentiellement d’un gonflement du temporel. Que ces rentes soient supprimées, le revenu global diminue, tel celui des Annonciades de Rouen : ‑ 4,5 %. Comme nombre d’établissements, elles possèdent d’importantes rentes sur l’Hôtel de Ville ou sur le Clergé de France mais elles subissent de grosses pertes lors de la banqueroute de Law. D’autre part, certains débiteurs payent leurs dettes en papier monnaie déprécié. Les religieuses s’en remettent parfois à des hommes d’affaires peu attentifs. La structure des patrimoines, composés de petites maisons, de lopins épars met en péril tout redressement. Il reste que les charges sont importantes : chapelains et confesseurs, mais aussi entretien des religieuses.

Il n’y a pas beaucoup de détails sur la vie quotidienne des sœurs. On peut noter, un procès en 1698 à propos de propriétés, et  le nombre d’entrées de 1718 à 1788 : 51, ainsi que l’âge d’entrée : entre 16 et 37 ans.

Dans le Pouillé de l’année 1776, on constate qu’elles ont 16,086 Fr. de revenus, qu’elles sont au nombre de 29 religieuses de chÅ“ur et de cinq converses. Une note ajoutée à la main porte : « Cette communauté est très régulière ».

Toutes les sÅ“urs, en 1790, optent pour la vie commune, sauf une. La communauté compte 29 membres et 5 sÅ“urs converses.  En effet, le 13 septembre 1790 ‑ Les Annonciades – (suite au décret de l’Assemblée Constituante voté le 13 Février 1790, supprimant en France les vÅ“ux monastiques) – en présence des officiers municipaux, donnent toutes un exemple unanime de fidélité.

La loi du 14 octobre 1790, en particulier, les articles 14 et 15 du titre II imposaient aux monastères l’obligation de dresser un état des religieuses, et de prendre la déclaration de chacune d’elles en particuliers si elles entendaient sortir de la maison ou si elles préféraient de continuer la vie commune. Aux Annonciades, sur 29 religieuses, 28 sont fidèles. Une seule consent à profiter des décrets.

Marie Daré, supérieure, déclare, selon le procès‑verbal, que « 5on inten­tion est de vivre et de mourir dans la Règle par elle embrassée et dans la maison par elle choisie ». Marie Digois, vice gérante, Madeleine de Tourny, Jeanne d’Avoult, Marie Levasseur, Françoise Chasbot, Marie Briet, Reine de Paix‑de‑CÅ“ur, Margue­rite Le Greffier, Marie Troussel, Marie Le Mire, Catherine Lettré, Marie Cardon, Marie de Romé, Marie de la Rue, Armande Lettré, Marie Drieu, Marie Hauchard, Marie Heugue, Marie Vautier, Marie Cantel, Félicité du Moron, Marie Grieu, plus cinq converses passèrent la même déclaration. Cela fait bien un total de 28 religieuses. En avril 1794, 13 Annonciades sont incarcérées.

Fin 1791. La chapelle ou église des Annonciades est fermée extérieurement, les fidèles ne peuvent plus y entrer. Leurs biens, propriété de l’État. Les bâtiments sont transformés en filature

1792, au mois d’août, parait le décret qui ordonne l’évacuation et la vente des maisons occupées par les religieux et religieuses, décret confirmé par ceux des 16 et 17 Août : en septembre, tous les biens des Annonciades sont saisis, en particulier un tableau représentant « La sainte Jeanne à genoux  » de Deshays. Les bâtiments ont abrité après la Révolution une communauté du Bon Pasteur. Après la guerre de 1939-1945, les bâtiments ont été démolis et sur l’emplacement le lycée Jeanne d’Arc  a été construit. Une rue « des Cantelles » existe dans le quartier, en souvenir des Annonciades.

Sources manuscrites

Archives Départementales de la Seine-Maritime  (Rouen) série H 58 H ; série G 827 à 840, G 1282, 5515 … 5542 ;  Archives Départementales des  Yvelines série H 60 H ; Centre de documentation du patrimoine (Rouen).

Sources imprimées

« Le sceau du monastère Annonciade de Rouen », Bulletin de la commission des antiquités de la Seine inférieure, tome 18, 1927.

« Les Annonciades chez nous », La Croix de la Seine inférieure, 28 mai 1950.

Allinne M., « Le sceau des Annonciades de Rouen », Journal de Rouen, 20 février 1938.

Amiot J., Histoire de la ville de Rouen, chez Jacques Amiot, Rouen, 1710, tome troisième, p. 483 : Religieuses de l’Annonciade.

Bunel Abbé, Géographie de la Seine inférieure, 1879.

Duplessy Dom,  Description géographique et historique de la Haute Normandie, tome 2, 1749.

Histoire de la ville de Rouen, Rouen, chez Bonaventure le Brun, 1738, p. 425-426 : religieuses de l’Annonciade. .

Loth Abbé, Histoire du cardinal de la Rochefoucauld et du diocèse de Rouen pendant la révolution, 1893, p. 330 353 358 367 371 377.

M… , Abrégé de l’histoire ecclésiastique et politique de la ville de Rouen, chez François Oursel, imprimeur, Rouen, 1754, p. 452 : Les religieuses, Annonciades.

Mémoire pour les religieuses de l’ordre des dix vertus de la sainte Vierge, vulgairement dit de l’Annonciade du monastère, fondé et estably en la ville de Rouen, demanderesses, contre sieur Aubourg etc. Rouen 1698, ouvrage n°370428, BM Lyon.

Periaux N., Dictionnaire des rues et places de Rouen, chez A. Le Brument, Rouen, 1870, p. 25, 82, 386.

R.R.V,  « Les Annonciades de Gisors, Montfort sur Risle, Rouen », Journal de Rouen, 18 décembre 1940.

R.R.V., « Les Annonciades de Rouen et de Gisors », Journal de Rouen, décembre 1940.

RHF, tome 5, 1928, p. 140, 418-419 ;  FF, tome 4, 1921, p. 92.

Rouault de la Vigne R.., « Des Annonciades au Bon Pasteur », Chronique du journal de Rouen, 17 février 1938.

 

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