« […] dans la pratique de cette vertu [de miséricorde] nous devons surpasser tout le monde et avoir compassion du monde entier. Et c’est particulièrement à toute personne que doit s’étendre notre compassion. Notre bonne Mère et sainte Fondatrice désirait nous voir exercer la charité entre nous. C’était le vœu de son cœur. Elle suivait l’exemple de saint Bernard et ne pouvait supporter nous entendre dire le moindre mal les unes des autres » (Sermon « Les dix Marie » dans Les Sources, p. 1025)
Avoir compassion du monde entier…, vaste programme qui en réalité va s’incarner -oui, réellement prendre corps – à travers sa mise en Å“uvre. Car si on parle de mise en pratique d’une vertu le père Gabriel Maria nous invite à ne pas en rester à des discours sur la charité vraie. La vertu est dynamique – du dynamisme de l’Esprit Saint et elle prend corps dans des actes concrets. Quand le Seigneur m’inspire un acte ou une parole pleine de sa bonté, sans bruit de parole mais en inclinant mon cÅ“ur vers ce bien à accomplir alors ne nous bouchons pas les oreilles du cÅ“ur. Posons les actes qu’il nous inspire et plus nous sommes dociles à ces impulsions spirituelles plus notre amour se fortifiera, grandira, embrasera tout mon être pour courir sur ce chemin si simple de la bonté. En revanche si je fais la sourde oreille, me freinant dans la mise en Å“uvre des actes de charité vraie que Dieu m’inspire, alors la douce voix s’amenuise et attend que je sois disponible et généreuse. Ainsi, le Seigneur cherche la bonne terre en moi qui donnera du fruit au centuple.
C’est particulièrement à toute personne que doit s’étendre notre compassion (…) Tout d’abord, notre bonne Mère et sainte fondatrice désirait nous voir exercer la charité entre nous : entre nous, au milieu de la communauté dans laquelle Dieu m’a plantée : c’est là le terreau réel où je suis appelée à aimer et à me laisser aimer. C’est dans cette lourde glaise que le Seigneur va me façonner un cœur réellement aimant.
C’est tellement plus facile d’aimer tout le monde que d’aimer celui ou celle qui est à côté de moi, dans ma communauté, dans ma famille, au bureau ou à l’atelier. C’est tellement plus facile de compatir à tant de personnes qui souffrent au loin de cataclysmes que de compatir à celui qui est à côté de moi, sous le même toit que moi, qui me casse les pieds mais qui justement à peut-être un cataclysme quotidien au-dedans de lui tous les jours mais dont j’ignore tout.
Elle [Sainte Jeanne de France] ne pouvait supporter nous entendre dire le moindre mal les unes des autres : voici bien ce péché sur lequel le père Gabriel Maria revient sans cesse : la médisance, les ragots, les bavardages malfaisants. Voilà un péché tellement banal dont nous mesurons si peu les méfaits. C’est aussi un péché tellement difficile à combattre. Il y a tout de même deux « trucs » qui sont efficaces pour éliminer cette terrible mauvaise herbe qui tue invisiblement : le premier est d’en prendre conscience. Pour pouvoir nommer mes médisances, en chercher la source (envie, jalousie, imprudence, pour faire rire sur le dos de la personne dont je médis ?) et ensuite m’en confesser. Voilà un premier outil qui porte des fruits. Et le deuxième : nourrir un bon regard sur l’autre en étant attentif à ses qualités, à ce qu’il fait de bien. Et si je ne trouve rien, c’est parce que je n’ai pas été suffisamment attentive à celui ou celle qui est proche de moi. Nous voici donc au seuil de l’Avent avec deux outils à l’efficacité vérifiée, expérimentée. Nous pouvons les utiliser et réutiliser : ce sera une joyeuse préparation pour Noël et nous pourrons prendre part à l’enfantement de Jésus en nous.  Bel Avent !
Sœur Marie de l’Annonciation, ovm