Pour aller au devant du père Gabriel-Maria et suivre ses traces, une des principales sources est sans nul doute la première vie du franciscain qui a fait l’objet de deux rédactions de la part de son auteur – une rédaction brève et une rédaction longue. Cet auteur est soeur Françoise Guyard, la propre nièce du religieux, une moniale du monastère des Annonciades de Bourges. Cette première vie comporte deux rédactions, une brève terminée en 1556, une longue terminée en 1561. Elles sont un recueil à la fois de souvenirs que la soeur Françoise a recueillis auprès de Gabriel-Maria, auprès des premières Annonciades, ainsi qu’auprès de tel ou tel Frère Mineur ayant connu le religieux, et un recueil de sources, c’est-à -dire de documents originaux, conservés dans les archives du couvent, auxquels a eu accès soeur Françoise qui les a recopiés aussi bien dans sa première rédaction que dans la seconde. Grâce à son ouvrage, l’auteur nous révèle quelque chose de son oncle, certes, mais aussi quelque chose de ceux et de celles qui l’ont connu ; elle nous révèle tout un milieu, un climat qui met en lumière l’idéal spirituel de Gabriel-Maria.
Les manuscrits de soeur Françoise Guyard sont perdus. Heureusement, des copies manuscrites existent, tant de la rédaction longue que de la brève, en langue française et néerlandaise principalement.
Concernant les manuscrits en langue française, la seule copie connue actuellement de la rédaction brève est un manuscrit conservé à la Bibliothèque Mazarine, le manuscrit 2426. Terminée en 1574, cette copie a été faite à partir du manuscrit de la rédaction brève de soeur Françoise Guyard. Elle contient la vie de Jeanne de France et celle de Gabriel-Maria suivie d’un panégyrique du franciscain par le père Jean Fillon, confesseur des Annonciades de Bourges, donné le 26 août 1538. Elle se termine par un recueil de lettres, de bulles papales et de brefs pontificaux.
Concernant la rédaction longue, les manuscrits connus en langue française, sont plus nombreux : deux manuscrits du 17ème siècle, le premier de 1625, conservé à la Bibliothèque d’Issoudun – le manuscrit Issoudun 13 ; un autre de 1664, conservé aux archives départementales du Cher ; un manuscrit du 18ème siècle, conservé dans les Archives des Annonciades de Thiais, et trois du 19ème siècle, le premier est le manuscrit 2F138 conservé aux Archives Départementales du Cher, le second est conservé au monastère de Villeneuve-sur-Lot, et le troisième au monastère de Thiais.
D’autres documents constituent aussi des traces qu’il est intéressant de suivre quand on désire mieux connaître Gabriel-Maria. D’abord, les écrits de Gabriel-Maria lui-même, non seulement ceux destinés à l’Annonciade mais également ceux destinés aux Frères Mineurs ou à d’autres personnes : ils font entrer dans le cœur de ce qui l’habitait et qu’il voulait transmettre. Ces écrits sont tous traduits en français à partir des manuscrits originaux ou de copies manuscrites, ou bien encore à partir de leur première édition, parue du vivant même de leur auteur.
Il y a aussi les documents émanant des autorités de l’Église et de l’Ordre des Frères Mineurs : ils permettent d’éclairer les autres sources sur Gabriel-Maria, de se rendre compte de leur convergence. Un grand nombre de ces pièces officielles ont été transcrites et publiées par le franciscain Ferdinand-Marie Delorme, entre 1926 et 1928, dans la France Franciscaine sous le titre de Documents pour l’Histoire du Bienheureux Gabriel-Maria. Le père Delorme a pris le soin d’indiquer pour chaque original transcrit son lieu de conservation. Ces documents, numérotés de 1 à 112, mettent en lumière la sollicitude de Gabriel-Maria pour l’Ordre religieux fondé par Jeanne de France, son zèle et sa prudence dans les diverses charges qu’il a dû assumer au sein de l’Observance franciscaine, à une période difficile de son histoire.
Les Chroniques de l’Ordre franciscain sont d’autres traces que l’ont peut emprunter, entre autres, celle de Lucas Wadding et ses Annales Minorum, celle de Marc de Lisbonne et sa Quatrième partie des Chroniques des Frères Mineurs.
D’autres traces convergent vers celles qui viennent d’être évoquées.
Par exemple : une biographie écrite en 1669 par Paulin du Gast, Frère Mineur, Gardien c’est-à -dire supérieur du couvent de Mirebeau, en Touraine et confesseur des Annonciades du monastère de Bourges. Au cours de son récit, il cite quelques lettres du père Gabriel-Maria, en particulier deux, écrites à deux sÅ“urs de Bourges, les sÅ“urs Mathurine de Beaulieu et Françoise de Mouhet. Certes, on peut se poser la question de leur authenticité. Cependant, en les lisant on s’aperçoit de leur rapport étroit avec les sermons sur les vertus de la Vierge que Gabriel-Maria a donné à la communauté de Bourges entre 1505-1515. Ce que rapporte Paulin du Gast est bien l’enseignement que Gabriel-Maria donnait à ses filles spirituelles.
Et encore : un manuscrit conservé à la Bibliothèque universitaire de Gand sous la cote Ms 2560. Il date  des 16ème – 17ème siècles et s’intitule « Livre de dévotion d’une religieuse du couvent des Annonciades à Louvain ». Ce recueil comprend un ensemble hétérogène de textes de dévotion en néerlandais, de différentes mains. Le texte le plus ancien porte la date du 17 mai 1546, le plus récent est du 31 juillet 1671. Quelques pages imprimées, la plus récente datant de 1710, ont été intégrées au manuscrit. Même si ce manuscrit ne forme pas un ensemble cohérent, il contient des informations précieuses, sur la dévotion des religieuses Annonciades. On y trouve, entre autres, trois lettres du père Gabriel-Maria que les sœurs de Louvain ont traduites en leur langue. Deux semblent plutôt adressées à des couvents de Frères Mineurs ; une, par contre, est adressée à des Annonciades.
Enfin : une autre biographie du 17ème siècle écrite par le franciscain Jean Blancone, confesseur des sÅ“urs Annonciades de Rodez, là où mourut Gabriel-Maria. Publiée à Toulouse en 1627, elle est actuellement introuvable. Heureusement, elle a été traduite en néerlandais, et du néerlandais en français. La traduction néerlandaise, restée manuscrite, est actuellement conservée au Centre de Documentation et de Recherche – Religion-Culture-Société – de l’Université catholique de Louvain. C’est le manuscrit MF-15 provenant des Franciscains de Saint-Trond.  Les archives du monastère des Annonciades de Thiais possèdent une copie de la traduction française.
Ces « traces documentaires », qui ne sont pas exhaustives, nous conduisent à Gabriel-Maria, elles nous rapprochent de lui. Elles dévoilent quelqu’un soucieux d’apaiser les conflits que traverse son ordre en ce temps-là , plutôt que de les attiser en tombant dans la polémique ; quelqu’un empli de miséricorde. Grâce à son apostolat de confesseur, il connaissait bien le cœur humain avec ses grandeurs et ses faiblesses. Loin de faire preuve de sévérité et de rigueur, il travaillait plutôt à ramener ses pénitents sur le chemin de l’espérance en la miséricorde de Dieu, sur le chemin d’une immense confiance en l’Amour de Dieu. Sa profonde dévotion à la Vierge Marie ne doit pas être pour rien en cela, Elle, la Mère de Miséricorde.
Des travaux biographiques sont aussi en préparation afin de sortir de l’ombre cette « figure incontournable du renouveau monastique à l’époque » des réformes (Sylvie Bernay, Femmes de Dieu, p. 89).
Enfin, sa cause de béatification ou de reconnaissance de culte est en cours.
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